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mardi, 13 avril 2010

Dossier Dantec (2004)

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 2004

DOSSIER “DANTEC”  :

 

Dantec devant les cochons

Source : http://ca.altermedia.info

 

MD-B.gifComme Présent l’avait prévu dès l’automne (1), le grand romancier et essayiste Maurice G. Dantec est soumis depuis quelques jours à une attaque en règle des «.Maîtres Censeurs » (2), de ces petits marquis islamo-gauchistes qui, depuis leurs quartiers chics et tranquilles de Saint-Germain veulent régenter les lettres et la pensée française.

 

Tout a commencé par une curieuse offensive à l’évidence préméditée, et collective, sur le forum du journal gratuit canadien Voir (3) qui s’est soudainement mis à vomir des messages d’insultes contre l’auteur de Babylon Babies (4) coupable, en vrac, d’être un « nazi américano-sioniste » (?), un islamophobe, un facho, et autres noms d’oiseaux.

 

Entre-temps, Dantec qui, du fait d’un quasi ostracisme dans les médias français, a pris l’habitude de lire, écrire et débattre sur le Web, lequel reste – pour le moment – un espace de liberté, commit l’irréparable péché de s’inscrire à la newsletter du Bloc Identitaire (5). Pire encore, l’écrivain poussa le vice jusqu’à accompagner cette démarche d’une lettre à Fabrice Robert, dirigeant du Bloc, pour lui préciser que, bien qu’en désaccord fondamental sur les positions de cette formation en ce qui concerne les Etats-Unis et Israël, il appréciait leur bel activisme contre le groupe de rap anti-français Sniper, pour leur défense de l’abbé Sulmont, et, plus généralement, leur lutte contre l’islamisation de la France. Last but not least, en homme courtois (quel ringard !), il leur souhaitait à la fin de cette missive, dont il autorisait la publication, tous ses vœux pour 2004… C’en était trop !

 

Ou plutôt, bien sûr, c’était enfin le « faux pas », qu’attendait le troupeau gras des cochons de la médiaklatura pour couiner en chœur leurs délations, leurs malédictions et leurs excommunications contre l’intellectuel qui avait osé, entamer un débat avec les intouchables, les lépreux de la droite identitaire !

 

Des « cochons » oui, comme disait Léon Bloy (1) qui fut aussi, en son temps, la cible d’une vindicte généralisée de la presse parce qu’il avait eu le malheur de défendre Tailhade ; et qui leur répondit en rédigeant Léon Bloy devant les cochons (6), que nous nous sommes permis de paraphraser dans notre intitulé. Des cochons comme ceux qui, dans l’excellente fable de George Orwell, prennent le pouvoir de La ferme des animaux en y installant leur totalitarisme absurde pour mieux se goinfrer au nom de la liberté.

 

Des cochons donc, vautrés dans leurs turpitudes, qui trouvent charmant d’aller biser les terroristes du Chiapas, de fêter le livre (!) chez Fidel Castro, de voter pour Arlette Laguiller, et, donc, le projet d’une bonne révolution sanglante, ou encore, et la liste serait longue, répandent leur vulgate d’anciens communistes, complices de régimes génocidaires, dans toutes les feuilles et sur tous les écrans.

 

C’est Libé, bien sûr, qui a sonné l’hallali, jeudi, en un article où l’amalgame simpliste n’avait d’égal que le verbe venimeux. Le Monde récidivait dans la foulée – « Dantec s’affiche avec l’extrême droite » - dans l’inénarrable style bolcho-jésuitique qui est le sien. Et c’est d’ailleurs dans ses colonnes que l’on pouvait lire avec stupeur la « réaction » de Patrick Raynal, directeur de collection du pestiféré Dantec, qui enfonçait ainsi l’un de ses poulains en s’estimant « catastrophé, étant contre toutes les opinions » de Maurice G. Dantec. Consternant.

 

Et l’ « affaire Dantec » d’enfler maintenant jusqu’au Canada, où le quotidien La Presse a cru bon d’apporter ses rondins au bûcher. Sans parler d’internet qui voit les sites gaucho-bobos se remplir d’indignation vengeresse. Mais nous concluions lors de notre précédent article que l’écrivain catholique n’était pas du genre à se laisser faire sans combattre. Lui qui pense la littérature comme un combat pour la Civilisation Occidentale chrétienne et se veut un « guerrier du Verbe », ne manque pas de rage et de souffle.

 

Déjà, ses réponses fusent depuis Montréal comme autant de missiles intercontinentaux ! Il y dénonce avec véhémence ces « journalistes » sans déontologie ni métier, leurs « mensonges » « qui prouvent [qu’ils sont] très proches des officines de désinformation gouvernementales ». Il assume ses écrits, avec une belle témérité qui devrait faire honte à tous les lâches du système, chiens couchés, silencieux, aux pieds des inquisiteurs de la grosse presse anarcho-trotstko-bancaire.

 

Mais nous disions aussi, « qui sait s’il ne se trouvera pas de nombreux et inattendus soutiens qui rallieront le labarum archéo-futuriste de ce Constantin de la littérature française ». Et c’est ce qui semble arriver. Déjà, nous savons que de nombreux mails et courriers de fans, issus de tous les milieux et de tous bords, partent en direction de la prestigieuse maison Gallimard (7) afin qu’elle mobilise pour soutenir son auteur. La revue culturelle Cancer ! n’est pas en reste, qui a ouvert une page spéciale sur internet (8) et dont les rédacteurs se solidarisent avec maudit ; le site subversiv.com aussi, qui publie une interview choc de Dantec et bien d’autres encore, dont, évidemment, les militants du Bloc identitaire.

 

On peut aussi imaginer, et nous l’espérons, que ses amis intellectuels et écrivains dits « nouveaux réactionnaires » qui avaient fait naguère crânement face à l’attaque du commissaire politique Lindenbergh, sauront faire preuve de solidarité avec lui. Et puis, la meilleure solution est encore d’aller acheter massivement les œuvres de Dantec, en vente dans toutes les librairies, car dans ce monde hélas dominé par le fric, c’est par le porte-monnaie qu’il faut convaincre le landerneau des lettres que ce genre de lynchage ne nous impressionne plus.

 

Olivier GERMAIN.

 

1. Faut-il brûler Maurice G. Dantec, Présent du 3 octobre 2003

2. Elizabeth Lévy, Lattès, 2002

3. www.voir.ca

4. Gallimard, La Noire, 1999

5. Bloc Identitaire – BP 13 – 06301 cedex 04 et www.les-identitaires.com

6. Mercure de France, 1895

7. Éditions Gallimard – 5, rue Sébastien-Bottin – 75328 Paris cedex 07. presse-serie-noire@gallimard.fr - Tél. : 01.49.54.42.00 Fax : 01.45.44.94.03

8. http://frkc.free.fr/revuec/dantec_nettoyage.htm sur revuecancer.com

 

“Dantec, un catholique futuriste”

 

MD grandjunction.jpgQue cette affaire Dantec est significative ! Que la France et le Québec représentent à la perfection le pire Occident ! Chez nous, une lâcheté endémique, apprise d’abord à la garderie, puis à l’école primaire, où l’on enseigne aux garçons à ne pas être des garçons, où ils sont castrés, n’ont pas le droit de se chamailler, sont traités comme de futurs hommes roses (ou gris), et ainsi de suite jusqu’à l’université. Le système d’éducation du Québec est une vaste entreprise de féminisation du mâle. On extirpe des coeurs toute violence et toute agressivité au lieu de discipliner et d’ennoblir ces instincts à l’origine des vieilles vertus militaires et chevaleresques garantes de la véritable paix et de la sécurité des plus faibles. On construit de cette façon un petit être inoffensif, fatigué, dépressif, aux instincts appauvris, sans résistance, et qui subit toujours. De là, le pacifisme des jeunes. Y a-t-il pire maladie morale ?

 

FAITES LE MORT, PAS LA GUERRE ! Ce défaitisme ignoble nous a été inculqué sur les genoux de nos professeurs. Nos politiciens sont des produits de cette éducation : des chiffes molles sans dignité. Cela c’est nous ! Le Québécois ressemble au dernier homme que redoutait Nietzsche. C’est en ce sens que le Québec est le théâtre des opérations. Le nouvel Adam, le produit glorieux (et ultime) de l’histoire universelle, c’est bien l’homo quebecensis, un homosexuel athée et pacifiste de gauche dont la bouille à la Michel Tremblay attend de se retrouver sur tous les timbres postes de l’Anation québécoise et qui tend les bras à Kofi Annan, pour que soit fondée sur le sinistre modèle québécois l’Anation mondiale ! Le Québec n’est tout entier qu’une maladie. Il est aussi, à sa manière, une prophétie. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? N’est-ce pas parce que nous avons imité la France ? Le totalitarisme cool à la québécoise, la décomposition arrogante, le pourrissement béat de toute une société (et non seulement d’une classe), nous viennent en droite ligne (par la gauche) de nos cousins français. La France et le Québec sont des dissociétés qui se confortent dans l’auto-adulation ("société distincte” ou “spécificité française"), l’antiaméricanisme, l’intolérance branchée, le conformisme culturel, le relativisme moral, le libéralisme extrême, une dépendance psychopathologique aux programmes sociaux, psycho-sociaux, méta-sociaux. La France et le Québec modernes, c’est l’Occident ” délivré ” du christianisme. Une proie facile !

 

Le Québec singe une France en train de crever et j’ose affirmer qu’il a dépassé son modèle. Il est vrai que la crevaison finale, lorsqu’il existe un désir sincère de ne pas être, un goût délicat d’extinction et de mensonge, une identité de plus en plus incertaine, n’est pas une tâche surhumaine. Loin de là ! L’islam dans un contexte pareil est simplement en train de terminer le travail…

 

Plusieurs ont consenti à ce qui apparaît comme une fatalité. Pas Dantec. Il a compris que l’Occident, ses libertés, sa pensée, son art, n’ont nul autre appui que le Dieu chrétien et juif, Créateur et Rédempteur. Il a donc entrepris de mettre fin à la grande crise nihiliste avant que celle-ci ne détruise l’Occident. De quoi l’accuse-t-on au bout du compte ? D’avoir greffé à des propos essentiellement raisonnables un peu de véhémence ? Eh quoi ! Il en faut lorsqu’on essaie de réveiller les morts, c’est-à-dire une gôche qui a tout bradé, l’honneur inclus, ainsi qu’une vieille droite nostalgique, neurasthénique, hystérique et paraplégique, complice de la décadence, à laquelle elle se complaît en un voyeurisme stérile et ambigu !

 

Dantec est un catholique futuriste (je mentionne que l’un des grands convertis du XXe siècle, Giovanni Papini, est issu du futurisme). Appelons catholiques futuristes ceux qui ont réussi la traversée du désert nihiliste pour enfin retrouver la Terre promise, plus splendide qu’aux premiers jours du monde. Et le voilà dans la bataille ! Qu’il est beau, qu’il est émouvant le courage du lion face aux hyènes… On le compare à Louis-Ferdinand Céline. Moi je discerne les ombres de Tertullien et de Léon Bloy, deux théophores, hagiophores, christophores et naophores (j’emploie ici le vocabulaire fastueux de saint Ignace d’Antioche), capables eux aussi d’une salutaire férocité. N’oublions jamais que nous devons affronter une énergie effrénée et vicieuse avec une vigueur virile et rationnelle (” We must meet a vicious and distempered energy with a manly and rational vigour ”, Edmund Burke).

 

Dantec nous réapprend une vertu trop dédaignée, la vertu de force. Il est bon qu’il soit parti de Nietzsche (et mieux encore qu’il ne s’y soit pas arrêté), car la vertu de force est inconsciemment (et quelquefois consciemment) méprisée par plusieurs chrétiens. Ne savent-ils plus que sans elle il n’existe ni véritable paix ni vraie justice ? La mentalité pacifiste et gauchisante est en définitive l’outil idéal pour l’islamisme et ses sbires. La lutte contre l’Islam jihadiste contribuera-t-elle à une renaissance de la France, à l’image de l’Amérique qui, elle, réussira (peut-être) sa Contre-révolution à cause de l’odieuse agression d’Al Qaeda ? L’Amérique croyait à tort avoir apprivoisé l’esprit révolutionnaire avec le libéralisme lockien et jeffersonnien. Elle ignorait que, insatiable, le principe révolutionnaire ne se contente ni de l’individualisme, ni même du collectivisme : on ne satisfait jamais un monstre dont la nature est de toujours répondre oui au mal. Pour lui, the Hell is the limit. Les meilleurs parmi les conservateurs américains ont alors compris que, s’ils ne réagissaient pas, surgirait le règne des égorgeurs, ceux-ci invités, cajolés, soutenus, par l’anomie libérale et qu’il fallait d’urgence que l’Amérique s’enracine à nouveau dans le christianisme natal qui l’a fondée. Quel spectacle et quel combat chez nos voisins du sud ! Le Joseph de Maistre américain, Orestes Brownson, enseignait déjà, en plein XIXe siècle, que le destin de l’Amérique et celui de l’Occident étaient suspendus au mouvement civilisateur universel : l’Église catholique romaine.

 

Aujourd’hui, plusieurs intellectuels américains ont recueilli la leçon du maître. Pendant ce temps, dans la Francité islamophile, le cercle des saddamistes dépités, (l’expression appartient à l’excellent Guy Millière) s’acharne contre le héros qui refuse la fin de la France, malgré la France elle-même. Osons, à la façon de Montalembert, une prédiction : le fils des croisés ne sera pas vaincu par les fils de Voltaire et par ceux de Mahomet. En tout cas, ce n’est pas la lecture, sur le site de Cancer!, des réactions d’Albert Sebag (Le Point) et de Pierre Marcelle (Libération) qui abattront un Dantec. Quel tartuffe que le premier et quel animal venimeux que le second ! Je ne me permettrai qu’une seule remarque à ces adeptes de la non-résistance à l’islam.

 

L’islamophobie, comme ils disent, est un signe de santé. Un chrétien islamophile se dénomme dhimmi (un dhimmi en devenir, comme les Français actuels, ou en fonction, comme les chrétiens du Proche Orient) ! La crainte de l’Islam est traditionnelle en Occident. Elle est en outre parfaitement justifiée par l’histoire et par la théologie. Ce n’est pas Dantec qui fait de Mahomet une des trois grandes figures de l’Antéchrist, c’est le Cardinal John Henry Newman, un exemple suprême d’urbanité (dixit l’incroyant Matthew Arnold) dans la littérature anglaise et l’un des plus grands théologiens depuis saint Thomas. Selon Newman (dans ses sermons sur l’Antéchrist), les trois grandes figures annonciatrices de l’Antéchrist sont Antiochus Épiphane, Julien l’Apostat et Mahomet. Le premier s’attaque spécifiquement à la religion (juive, évidemment). Le second est devenu empereur, quelques années après l’apparition d’une des plus terribles hérésies chrétiennes : l’arianisme. Il a d’ailleurs été éduqué par des Ariens (qui niaient la consubstantialité du Fils avec le Père et donc la divinité du Christ). L’arianisme fut pendant un certain temps quasi tout-puissant dans la chrétienté. On peut soutenir qu’il annonce l’islam et que celui-ci est bien, dans l’esprit de Newman (comme dans celui de Dantec) la grande division (plus importante que la Réforme). En ce sens, il faudrait parler de l’islam comme d’une première modernité (qui se joint en notre temps à la modernité occidentale proprement dite). L’avancée actuelle de l’islam en Europe n’est-elle pas annonciatrice de l’assaut ultime du nihilisme ? Dantec le croit : il a senti l’odeur de la bête.

 

Marcelle met sur le même plan l’antisémitisme et l’islamophobie. L’erreur est manifeste quoique nullement désintéressée ! L’antisémitisme est une abominable hérésie pour un chrétien ou un fils de chrétien, une espèce de marcionisme inconscient, un rejet de l’Ancien Testament, un crime contre la première Personne de la Sainte Trinité. Mais l’islam est l’hérésie par excellence : négation de la divinité du Christ et mépris de l’ordre naturel, une hérésie qui entraîne “la dégradation de la femme, l’esclavage de l’homme et la stérilité de la terre” (Donoso Cortès). Heureusement, il y a quelqu’un quelque part qui veille et qui résiste.

 

Jean RENAUD,

30 janvier 2004

 

Jean Renaud est le Directeur de la rédaction d’Egards, revue de résistance conservatrice - http://www.egards.qc.ca

 

Le droit de réponse de Maurice G. Dantec, REFUSÉ par Libération

 

MD-LRDM-B.gifIl existe un Paradis pour les journalistes. Comme il existe un enfer pour les écrivains.

 

Le paradis des journalistes s’appelle : LA PEUR. Et il conduit très directement à l’enfer des écrivains.

 

La Peur est le véritable maître de l’Homme de presse, c’est par elle qu’il règne, depuis bientôt 200 ans, sur la libre pensée, qu’il écrase de ses bottes à chaque occasion qui se présente. Celle-ci devient de plus en plus en rare. LA PEUR ! Son régime de domination si particulier s’est en effet instauré dans tous les esprits. Tout le monde est le flic de chacun, et de tous, et à commencer par soi-même.

 

Ernest Hello avait su, il y a plus d’un siècle, en quelques lignes fulgurantes, délimiter fermement la ligne de partage entre la peur et la crainte. La crainte c’est ce qui vous force à vous agenouiller devant la plus haute des souverainetés, et en fait elle conduit à la JOIE. La peur, créature du Diable, ne forme au final que des valets, dont l’angoisse est proportionnelle à l’ennui. Aussi, dès que par l’effet d’une sorte de hasard parfaitement impromptu, une voix ressurgit du silence, c’est-à-dire du bavardage continu qu’ils avaient cru une fois pour toute installé sous leur arbitrage, alors leur sang de navet ne fait qu’un demi-tour et leur bouche écume la rage tout juste bouillonnante des petits frustrés.

 

Pierre Marcelle est le chef de ces Archanges dont les merdicules d’encre et de papier mâché auréolent la présence plus sûrement encore que le halo des saints. Il est le Grand Vigile. Le Grand Collaborateur. Il est celui qui veut que les paroles qui sont des actes (je paraphrase à nouveau le grand Hello) cessent, immédiatement, car pour lui, la parole, il suffit de lire sa consternante prose dont on ne voudrait pas comme serpillière à urinoirs pour s’en apercevoir, la parole, pour Marcelle, c’est ce qui se répète, jusqu’à la nausée, dans les colonnes de son torchon.

 

La Peur a un seul ami. Son nom est Mensonge. Par exemple, lorsque ce triste Jdanov du Ve arrondissement se permet de dire que je me suis lié politiquement à un groupe néo-nazi, l’enflure Marcelle ne peut invoquer l’erreur : il commet sciemment un double-mensonge, comme d’autres pratiquent le double fist-fucking. Marcelle avait envoyé quelques sbires faire le sale boulot à sa place il y a une quinzaine de jours. Après tout, pourquoi paye-t-on au lance-pierre, avec des salaires de peóns brésiliens, les pigistes de Libé ?

 

Mais sa petite conjuration n’a trouvé qu’assez peu d’imbéciles pour lui emboîter le pas, mis à part ce qui fut un jour “Le Monde”. Aussi, enragé d’être forcé de constater que toute la France médiatico-culturelle ne le suivait pas comme un seul homme, prêt à brandir la tête de l’infâme au bout de sa pique, Marcelle, son courage ne parvenant pas tout à fait à se liquéfier sous lui, l’a pris à deux mains et l’a répandu dans un article dont la confection et le message rappellent fâcheusement, même certains de ses “amis” s’en sont rendus compte, les méthodes du Die Stürmer ou de la Pravda de la grande époque. Rien, absolument rien ne peut arrêter un Pierre Marcelle. Rien ne peut arrêter le nihilisme de ces petits-bourgeois de gauche, rien ne l’arrêtera, sinon sa propre agonie, qui est d’ailleurs si proche que c’est à se demander si tous ces piaillements ne signifient pas en fait que son heure, enfin, a sonné.

 

Ce qui, bien sûr, augmente d’autant la détresse du Marcelle. Le Marcelle vit dans un Monde qui doit absolument se perpétuer, c’est à dire sous la forme désormais indépassable de la contestation-marchandise.

 

Dans le Monde des Marcelle vous avez le droit d’être tout :

Vous avez le droit d’être homosexuel.

Vous avez le droit d’être athée.

Vous avez le droit d’être communiste.

Vous avez le droit d’être socialiste.

Vous avez le droit d’être écologiste.

Vous avez le droit d’être anarchiste.

Vous avez le droit d’être pro-islamiste.

Vous avez le droit d’être anti-sioniste.

Vous avez le droit d’être libéral.

Vous avez le droit d’être anti-libéral.

Vous avez le droit - et même le devoir - d’être anti-impérialiste.

Vous avez le droit (comprenons-le en fait sous le sens de “devoir") d’être anti-occidental.

vous avez le droit (devoir) d’être anti-capitaliste.

Vous avez le droit-devoir d’être contre toute “survivance de l’ordre ancien” honni.

 

Mais vous n’avez pas, bien sûr, le droit d’être “nazi”, car ce mot-valise fort pratique permet désormais d’enfermer à double tour toute pensée critique dans les oubliettes du déshonneur, mais surtout :

Vous n’avez pas le droit d’être Chrétien, et encore moins Catholique.

Vous n’avez pas le droit d’être Sioniste.

Vous n’avez pas le droit d’être opposé - théologiquement et politiquement, ce qui ne fait qu’un dans cette religion - à l’Islam (sous peine d’être taxé d’islamophobie, cette maladie mentale qui fait, comme en son temps l’anticommunisme, des dégâts sans cesse croissants dans la conscience des européens).

Vous n’avez pas le droit d’engager un dialogue poli, quoique très critique, avec des gens qui ont été enfermés dans le mot-valise des Marcelle.

Enfin, vous n’avez pas le droit de vous émouvoir, avec quelque indignation, de l’existence de centres de viol répandus par centaines dans les “cités” de notre bienheureuse “République”.

 

Les Marcelle ne veulent pas que cela s’ébruite. Car leur Paradis pourrait alors s’écrouler.

 

C’est alors que leur seule amie, la PEUR, entre en jeu. Leur Monde ne pourrait tenir sans elle, car elle est ce qui, pour le moment encore, interdit aux bouches de s’ouvrir. Mais la peur est une physique instable, elle est une créature du diable, les Marcelle s’en croient les commanditaires, ils n’en sont que les manœuvres. Et c’est pour cela que la PEUR, maintenant, leur revient à la face. Quelque chose s’est produit. Quelque chose a désorbité la peur de sa propre balistique quotidienne. Quelque chose a retourné la PEUR contre elle même. Et cette chose, ô Miracle, c’est LA PEUR ELLE-MÊME.

 

Le paradis des Marcelle n’est qu’un simulacre, un PROGRAMME. Il est à peu près aussi réel que la dernière version de SuperMario. Le Monde réel, lui, vit sous sa domination car il croit que c’est ce simulacre, le réel, et lui-même, ne lui a t-on pas assez rabâché, qui est un pur phantasme. Par exemple le type qui se fait cramer trois fois sa bagnole dans l’année vit un PHANTASME. Comme les adolescentes violées en tournantes. Comme les gens qu’on fracasse à coups de pierres parce qu’il n’auront pas donné une cigarette, comme les filles qu’on incendie avant de les jeter dans une benne à ordure.

 

Le Paradis des Marcelle n’est valable que pour les Marcelle, et leurs sous-fifres. Il n’est donc réel que pour eux. Les autres, ces pauvres phantasmes dont l’idiotie est sans cesse moquée et dénoncée par les Maîtres du Simulacron, n’ont souvent - pour survivre dans le grand camp de concentration franco-mondial - comme nourriture de subsistance que des livres. C’est pour cela que l’œil du Grand Vigile est constamment braqué sur ceux qui parviennent encore à en écrire. Car nous parlons de livres, bien sûr, pas de ces objets de consommation jetables, comme les tampons hygiéniques, que précisément la Peur a domestiqué, et propose sans cesse aux citoyens de la “République”.

 

Dans son appendicule où chaque ligne exsude de haine et d’ignorance crasse, le Roi des Marcelle ne me promet rien moins que l’Enfer! Il se fait en cela, benoîtement, l’écho des quelques rumeurs qui ont couru sur internet au sujet de ma possible ”éviction” de chez Gallimard, et qui ont, de fait, créé l’effet papillon que personne n’attendait ! Pauvre Marcelle ! Incapable d’écrire dans une langue française un tant soit peu correcte, il croit pouvoir jouer les florentins de la rue Sébastien-Bottin ! Pauvre Marcelle qui n’a pas compris que LA PEUR que lui et tous ses sbires sans cesse distillent, a mobilisé, par milliers, à ce que je sais, des lecteurs de “Dantec-le-catho-facho” qui ont CRU, en effet - et n’avaient-ils pas toutes les raisons de le faire ? - que LA PEUR, encore une fois, aurait le dessus. Car cette PEUR, c’est celle dont Pierre Marcelle fait entendre régulièrement les jappement lugubres.

 

Ils ont en effet PEUR de toute la clique qui est aux commandes de la culture, tels des Duvalier du carré germanopratin. Ils connaissent son pouvoir de nuisance. Ils vivent eux-mêmes dans la PEUR. Cette PEUR, par je ne sais quelle divine intorsion des éléments, les a alors délivrés d’elle-même. Ils ont dit : NON. Ils ont dit NON, monsieur Marcelle, nous ne voulons pas que “Dantec” rejoigne “l’enfer” dans lequel vous avez jeté déjà tant d’autres écrivains, qui ne pensent pas comme vous.

 

Ils ont dit NON à votre Paradis monsieur Marcelle : vous êtes en effet très puissant. Vous être le valet de la Peur. Regardez maintenant son Maître droit dans les yeux.

 

MgDANTEC,

 

NE PAS SUBIR

Général de Lattre

 

Pour en savoir plus: http://www.egards.qc.ca

vendredi, 09 avril 2010

Avant-Garde Fascism

Avant-Garde Fascism

antliffAvant-Garde Fascism: The Mobilization of Myth, Art, and Culture in France, 1909–1939
Mark Antliff
Durham and London: Duke University Press,  2007

Mark Antliff, a professor of Art, Art History, and Visual Studies at Duke University, has put together a useful analysis of the cultural-aesthetic memes utilized by French fascists of 1909-1939 to promote their visions of national renewal. Antliff’s analysis focuses on the connection between fascist ideologies and the European avant-garde, which most people would more likely associate with the anti-national left. Antliff is fairly even handed in the book, with the occasional use of scare quotes to express his skepticism/disdain for certain “fascist ideas.”

In contrast, I believe his use of the term “democracy” should always have scare quotes, as “democratic” systems deceive the populace into believing that someone other than self-interested elites are running the show; however, apparently, Antliff and I disagree on our political preferences. Antliff also concludes the book with a line about how the ideas of the French fascists were not able to stem the tide of the “bloodshed” caused by the military aggressions of Hitler and Mussolini (including the invasion of France). Very well. One hopes an academic will write about the real blood that has been shed imposing “equality” on “the people” – either that of the mass-murdering Marxists or the genocidal globalist multiculturalists and their plans for a multiracial West. So much for my complaints about the book. What about fascism and avant-garde aesthetics?

Roger Griffin, in his Fascism (Oxford: Oxford University Press, 1995), famously described fascism as “palingenetic populist ultra-nationalism” – making the elements of renewal, rebirth, and regeneration central to all permutations of this ideology. It is also important to differentiate between real fascism and “para-fascist” ersatz fascism. Para-fascism is often confused with real fascism in the public mind, which gives the false impression that fascism is ossified reactionary conservatism, rather than a revolutionary movement interested in avant-garde themes and ideas.

The differences between real revolutionary fascism and para-fascism are easily summarized: Para-fascist regimes are authoritarian, traditionalist, reactionary regimes, often military dictatorships, that fossilize a status quo favoring traditional elites of business, nobility, religion, and the military. Such regimes want nothing to do with the revolutionary and palingenetic aspects of true fascism; the idea that the secular religious, Futuristic, and avant-garde characteristics of, say, (early) Italian Fascism has anything to do with Franco’s Spain or Pinochet’s Chile is absurd.

fortunato_depero_1945Indeed, as Griffin makes clear, fascists and para-fascists are usually, by their very nature, bitter enemies. While para-fascists may co-opt some superficial characteristics of their fascist opponents, in power they tend to ruthlessly suppress the expression of revolutionary fascism. When para-fascism attempts to co-opt fascism by sharing power – as Antonescu attempted in Romania with the Legionaries — conflict is inevitable, since the objectives of the two parties are completely different: para-fascist ossification vs. fascist palingenetic regeneration. Thus, in Romania, civil war between para-fascists and fascists led to the victory of the para-fascists, and the exile of the fascist forces. The idea that Antonescu was “fascist” is a byproduct of either ideological ignorance or ideological mendacity, a Marxist desire to strip their fascist competitors of revolutionary dynamism and reduce them to mere “bourgeois hooligans.”

Not all fascisms were equally “fascist” and revolutionary, and even individual fascist movements have oscillated between revolutionary ideals and borderline reactionary para-fascism.

For example, Italian fascism went through three distinct phases. In the years before the seizure of power and in the first half-dozen years of Mussolini’s regime, Italian fascism was in its “purest” form – revolutionary and palingenetic – emphasizing the regeneration of the Italian people and the Italian nation-state. Avant-garde themes and theorists, particularly Futurism, were important in this period, and individuals such as Marinetti were influential in early day Italian fascism.

However, the forces of reaction and of compromise with the establishment were always present; the presence of the King and the Vatican were two impediments to the process of “fascistization” that Mussolini could not, or would not, deal with. In the end, the Concordat was a turning point and the regime’s second phase veered to the “right” in the 1930s, becoming more conservative and reactionary, replacing internal regeneration with external imperialism. Without WW II, chances were good that Italian fascism would have degenerated into a stagnant para-fascist regime similar to that of Franco’s Spain.

Military defeat and the overthrow of Il Duce stopped that process; in the last and third phase of Italian fascism, the “Salo Republic,” the ideology shifted to the left, embracing a militant socialism, and becoming overtly pan-European in scope.

What about the Hitler and the Nazis? There has been some debate as to whether German National Socialism was a form of fascism. It seems to me obvious that it was; that differences existed between the Italian and German forms of fascism is not an argument against that conclusion. All genuine fascisms displayed important differences, yet still contained within themselves the core components of Griffin’s “palingenetic populist ultra-nationalism.”

In the case of National Socialism, the palingenesis was biological; Nazism was a heavily racialized and materialist form of fascism. The German National Socialists were tribalistic in worldview rather than Futurist, and, internal debates aside; Hitler himself was very hostile to the European avant-garde.

Thus, key differences between fascist forms are observed. The German brand had the biopolitical advantage of recognizing the importance of race. On the other hand, the Italian brand had the sociopolitical advantage of a more optimistic Futurist orientation, and was more open-minded with respect to tapping into the cultural energies created by the avant-garde artistic and sociopolitical movements extant in the first decades of the twentieth century.

eur-sq-colosseoIn some sense, perhaps the “purest” brand of fascism was that of Codreanu and his “Legion of the Archangel Michael,” also known as the Iron Guard. This intensely palingenetic movement emphasized spiritual and moral regeneration to create a Romanian “New Man” to lead the nation to a higher level and fulfill the destiny of the Romanian people. This highly “virulent” form of “palingenetic populist ultra-nationalism” proved itself unable to co-exist with Antonescu’s conservative authoritarian para-fascism; the Legionary movement’s attempt to seize full power for itself (rather than share it with para-fascists; this sharing was correctly seen by the Legionaries as being an emasculating compromise of their ideology) was crushed by the para-fascist military apparatus.

Three fascisms, three different movements. But the revolutionary energies unleashed by these ideologies stand in sharp contrast to the moribund and ossified conservatism of the para-fascists. The political/cultural avant-garde (Italian), the biological-racialist (German), and the spiritual/moral (Romanian) components of these fascisms are important to us today.

And it is probably wrong to separate out the avant-garde mindset as being only applicable to the political/cultural sphere. After all, we really do need new, cutting-edge memes with respect to both materialist race and non-materialist morality. To quote a certain pro-fascist poet: “Make it new!”

Mostra 1933With respect to Antliff’s book itself, chapter topics include Sorelian myth and anti-Semitism, and the fascistic politics of Valois, Lamour, and Maulnier. The importance of Sorelian myth was underscored by a recent Michael O’Meara piece that appeared on TOQ Online. Antliff stresses that culture and aesthetics were extremely important to Sorel in his quest to formulate a doctrine of instrumentally utilizing myth to overturn the hated rationalist-capitalist-democratic system. Art is part of this aesthetic emphasis and, truth be told, Sorel focused on culture over politics; indeed, he was scornful of the power of the myth being used and squandered for low-level political aims.

Further, Sorel went through a distinctly “anti-Semitic” phase, in which Jews were considered the exemplars of ultra-rationalist anti-creators, whose worldview set them in opposition to native peoples and native cultural expressions and aesthetics. Opposing the pro-Dreyfus “French” journal La revue blanche, Sorel sarcastically referred to the journal’s Jewish founders as “two Jews come from Poland in order to regenerate our poor country, so unhappily still contaminated by the Christian civilization of the seventeenth century.” Sorel accused Jewish intellectuals of wanting to promote an abstract (i.e., non-ethnic, non-national, non-cultural) concept of (French) citizenship and to also promote “cosmopolitan anarchy.”

Related to this “anti-Semitism,” Sorel admired and promoted the Classical World; the values of classical heroes, such as the Greeks at Thermopylae, were something counterpoised against the Jewish ethic and the degeneration of parliamentary democracy.

Sorel considered art as related to the creativity of work, a creativity that he wished to inculcate into the “productive workers” in place of assembly line mass capitalism and rationalized “one man-one vote” democracy. He also considered an enlightened “proletariat” as being able to reinvigorate a stagnant bourgeoisie through class conflict.

Georges Valois, 1878–1945

Georges Valois, 1878–1945

Georges Valois (born Alfred-Georges Gressent) went through a wide variety of ideological contortions in his lifetime, from fascism to “libertarian communism,” ending up dying in a Nazi concentration camp after being captured as a member of the “French Resistance.” While such an unbalanced individual represents much of what is wrong with the “movement” (changing your mind is one thing – completely switching your worldview from one moment to the next is another), some of his activities during his “fascist stage” are of interest.

Particularly enlightening is the focus on the urbanism of Le Corbusier, which stands in contrast to much of the American “movement” and its anti-urbanist emphasis on militant ruralism. No doubt, in the West today, the city is an anti-white, anti-Western disaster, full of racial enemies. No doubt as well that throughout much of human history, the city was an unhealthy and sterilizing place, inimical to racial survival and racial progress.

However, in our modern technological age, if we can solve our racial problems, the city itself does not necessarily have to be a racial evil. As part of a natural continuum of human ecologies – isolated rural, rural, suburban/town, small city, larger cities, etc. – the city may play an important role in the Futurist racial ethnostate of tomorrow, a place of technological advancement, racially healthy avant-garde memes, and sociopolitical dynamism. Racial nationalism can and should be reconciled to a certain degree of urbanism – not the urbanism of degeneration, but that of regeneration.

This of course underlies a schism within activism that often goes unnoticed – between modernist, technological tribalist-racialist Futurism and a ruralist anti-technological ecotribalism. It is clear that the French fascists described by Antliff for the most part fall into the first group. Thus, a major divide exists between the Futurist-Modernist fascists (think Marinetti in Italy) and the ruralist soil-oriented romantic past-oriented fascists (think Darre in Germany, or the agrarian-nostalgic Vichy regime in France).

Of course, a healthy society needs both worldviews, and in practical terms a balance is required. For example, Valois incorporated a “love for the native soil” along with his Futurist mindset. Indeed, Valois contrasted “Asiatic nomadness” associated with communism with the “Latin sedentary” style — derived from “cultured Roman legions” — of the French, tied to the native soil and inclined to fascism. He also associated the hated nomadic lifestyle with capitalism, since hyper-rational capitalism uprooted the workers from grounding in an organic society and turned them into atomized, rootless “nomads.”

A related issue is the relationship between Futurism and the veneration of the past. Antliff makes clear that the emphasis on the past in fascism (e.g., the Greco-Roman classical world) was not meant to mean turning back the clock and shunning progress. Instead, this look to the past was, paradoxically, futurist, in that the fascists wanted to take from the past certain noble values and behaviors and use these to help build the modern, technological world of tomorrow. Therefore, one need not discard the past to build a new future, but judiciously use elements of the past as necessary building blocks for the projected futurist edifice. Different strands of fascist thought need not be incompatible, just as common ground must be found between the tribalist futurist and tribalist ruralist strands of modern racial nationalist thought.

Another French fascist, Philippe Lamour, also went through many ideological “twists and turns,” ultimately rejecting fascism in favor of anti-fascism and syndicalism. Lamour originally represented the fascist variant of “machine primitivism” – that is, an anti-rationalist “new consciousness attuned to the dynamism of technology.” Thus, urban industrialism, technology, productivity, and futurist modernism need not be associated with “rational” egalitarianism but with tribalistic fascism. Lamour wished to create a “community of producers” integrating the different classes of French society to overturn liberal democracy in favor of a modernist technologically dynamic fascist state.

Early French fascists such as Lamour also promoted the idea of a European federation, and attempted to make common cause with more pan-European and “leftist” German National Socialists, such as the Strasserian “Black Front,” who favored European cooperation as opposed to Hitler’s hegemony through military conquest. Not coincidentally, before he fell into Hitler’s orbit, Mussolini also favored an alliance of European (fascist) states, promoted through the doctrine of “Roman Universality,” with practical expression through events such as the pan-fascist Montreux conference.

Lamour’s greatest contribution to French fascism was the promotion of the “conflict of generations,” pitting the younger fascistic generation of WW I against the older generation of parliamentary democrats. This latter group was seen as being out of touch with the new age of national regeneration, avant-garde culture and politics, Sorelian myth, as well as technological productivity. Lamour and his “war generation” were at the forefront of the battle of youth vs. the image of fossilized reactionary status quo politicians.

Aesthetically, the work of German artist Germaine Krull and even Soviet filmmaker Sergei Eisenstein influenced the avant-garde sensibilities of “machine primitive” young French fascists such as Lamour. Antliff summarizes Lamour’s unique contribution to the ideology of interwar French fascism as the melding of “machine aesthetics” to the concept of generational warfare. Thus, to Lamour, technological dynamism and the replacement of the ossified previous generation with fresh youth were the Sorelian myths required to spark an era of national renewal.

Thierry Maulnier, 1908–1988

thierry-maulnier

Thierry Maulnier (born Jacques Talagrand), author of “Crisis Is in Man,” had as his concept of Sorelian myth “classical violence.” Within the journal Combat, Maulnier and colleagues opposed the leftist French Popular Front’s Marxist-themed “culture” with their own view of aesthetics in architecture and sculpture. Antliff describes Combat’s as focusing on “three interrelated spheres: political institutions, human spirituality, and aesthetics.” The classicism of the Maulnier school promoted the idea of a “synthesis of Dionysian energy and Apollonian restraint.”

Politically, Maulnier wished for a form of French fascism that rejected parliamentary democracy but which still supported the rights and aspirations of the individual, as opposed to what was perceived as the more authoritarian and collectivist societies of Fascist Italy and National Socialist Germany. These distinctions between French and other fascisms became more salient after Mussolini fell into Hitler’s orbit and became hostile to French national interests. Indeed, before the start of WW II, Maulnier advocated a “minimal fascist program” for France that would be both a short-term “fix” to bolster the French military for confrontation with the Axis, as well as preparation for the long-term and permanent fascistic remodeling of society after the Axis threat had dissipated.

It must be noted that the Valois, Lamour, and Maulnier fascist ideologies, while linked together by a palingenetic call for national renewal and a rejection of parliamentary democracy, did differ in important ways. In particular, the classicism of Maulnier can be contrasted with the militant futurism and “machine primitivism” of Lamour. Although Antliff stresses that the French fascist focus on the classical world does not necessarily imply a rejection of modernism per se, the specific differences between Maulnier and Lamour were the greatest of any of the individuals profiled by Antliff. Valois and Lamour both embraced the image of “industrial production” as a central motif of their ideology; however, while Lamour spun together a myth of generational conflict, Valois instead emphasized a “spirit of victory” in which the heroism of WW I will now be turned to a battle of the entire nation to create an organized fascist-industrial society. Of these three men, it was Lamour who was the most steadfastly “avant-garde” in cultural-aesthetic orientation, Maulnier the least.

Crude ethnic stereotyping may lead one to conclude that an emphasis on art, culture, and aesthetics in the creation of fascist ideology was (and is) a particularly “French” phenomenon. Of course, other fascist movements were concerned with these issues, sometimes to a significant extent, but none of them incorporated such memes into the core of the political thinking as did French fascist thinkers. Indeed, the cultural-aesthetic emphasis of the French strain of fascism is a breath of fresh air after immersion in the more focused political thought of the Italian Fascists and the racialist ideals of the German National Socialists.

In fact, all three areas of focus – cultural-aesthetic, political, and racialist – are required for a complete memetic complex to promote fascistic ideals. As a biological reductionist, I would emphasize the racialist first of all, but doing so with respect to modern genetic science rather than the sort of quackery that passed as “racial science” under the Nazis. However, biological racialism by itself is not enough. Without an edifice of political and cultural-aesthetic memes, the foundation of ultimate interests will go nowhere.

Related to this issue of political aesthetics, I was impressed by Alex Kurtagic’s analysis of “semiotic systems” and the importance of style in shaping perceptions of status within nationalist memes. This is important. Of course, the enemy will, as a matter of course, attempt to oppose this approach through co-option and/or mockery.

Co-option is a problem for any memetic threat to establishment power; for example, the GOP has effectively co-opted “rightist, racist” concerns through the exploitation of “implicit whiteness.” This strategy has enabled the Republicans to retain white support while at the same time moving continuously leftward in the direction of overtly anti-white policies.

Thus, while aesthetics and style are important, they always must be innately linked to content to prevent the establishment from utilizing the same semiotic systems to promote the exact opposite of our objectives. Dealing with co-option will be difficult, and it is crucially important that the problem be analyzed from the beginning in a proactive fashion.

In other words, right from the start, the construction of unique avant-garde racial-nationalist semiotic systems must incorporate strategies for preventing co-option and dealing with co-option if these preventive measures fail. Therefore, we must identify, in advance, as many problems with each approach as possible, and develop multiple contingency plans for dealing with each emergent counter-move of the establishment.

Mockery is also a problem; the establishment, utilizing its control of the mass media and its stable of celebrity puppets, can subject any racial-nationalist semiotic system to a barrage of withering ridicule. It is important that the elitist and superior nature of the system be of sufficient strength that adherents can turn around such ridicule and assert it as a matter of pride and not shame. In other words, the establishment ridicule itself must be mocked as the pathetic attempts of a dying and out-of-touch system to delegitimize a novel movement of which they are afraid.

Again, careful planning is required to plan against the establishment’s ridicule strategy, but if both co-option and mockery can be successfully dealt with, the semiotic-aesthetic strategy has a chance to achieve its objectives. And those objectives are, in essence, to defuse the “social pricing” attacks of the establishment against racial-nationalist activists and adherents, by providing an alternative value system opposed to, and independent of, establishment standards and acceptance.

In summary, Antliff has dissected a particularly interesting and heretofore unexplored strain of French fascism characterized by an embrace of avant-garde cultural concepts, modernism, Futurism, productivity and the planned society, urbanism and industrial technology, exemplified by so-called “machine primitivism.”

With today’s worries of “peak oil,” and concerns that the multiracial West will collapse, visions of decentralized ruralistic tribalism have again become prominent in nationalist thought. However, the white man is endlessly inventive, and free of the shackles of genocidal globalist multiculturalism, the technological genius of whites, so unleashed, may provide the foundation for a Futurist, technologically advanced and tribalist society. Such a society would have options for both the urbanist technological and ruralist agrarian lifestyles for those whose preferences are for one or the other.

Although I am sure he is an “anti-fascist,” Antliff’s work helps us to consider one technological Futurist option. The major conclusion from both Antliff’s and Kurtagic’s analyses is that staid and conformist methods for sociopolitical activism may be best replaced, at least in part, by avant-garde memes that let some “fresh air” into stale “movement” environs.

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mardi, 06 avril 2010

Louis-Ferdinand Céline par Ioannis Mouhasiris

Louis-Ferdinand Céline par Ioannis Mouhasiris

vendredi, 02 avril 2010

Bulletin célinien n°318

Le Bulletin célinien n°318 - Avril 2010

Au sommaire:
- Marc Laudelout :
Bloc-notes
- *** : Ce 1er juillet 1961…
- Kléber Haedens : Ce qui maintenant commence… [1961]
- M. L. : 1940, du désastre à l’espoir
- Bente Karild : Un ultime témoignage
- Gilles Roques : Quelques lectures de Céline au Cameroun en décembre 1916
- Claude Duneton : Céline et la langue populaire
- Frédéric Saenen : Basta cosi !
Un numéro de 24 pages, 6 € franco.
Le Bulletin célinien
B. P. 70

B 1000 Bruxelles 22
Belgique

Le Bulletin célinien n°318 - Bloc-Notes

Dans une récente chronique, l’avocat Jacques Trémolet de Villers évoque le Céline pamphlétaire : « Quand Céline blague, il le fait dans une outrance verbale, et dans un chant qui, par le style même, détruit ce qui pourrait paraître une horrible et désastreuse théorie : que le monde moderne serait gouverné, de Washington à Moscou et de Londres à Tel-Aviv, par les juifs. Céline se moque de lui-même et de son propre antisémitisme. Céline met en musique, en peinture et presque en danse la râlante gauloise et parisienne. Il la transforme en œuvre d’art, comme Goya le faisait de ses monstres. Ce qui lui importe, c’est le petit bijou que, dans ses courts chapitres, sans cesse corrigés et réécrits, il arrive à ciseler. Au bout du travail de l’artiste, la méchanceté s’est envolée. Il faut être niais comme un antiraciste primaire pour prendre au pied de la lettre le propos, qui n’a été prétexte, pour l’artiste, qu’à faire son œuvre d’art (1). »
Toute la complexité et l’ambivalence des écrits antisémites de Céline affleure dans ces commentaires. Sur le sujet – cette fameuse tradition polémique du « culte de la blague » –, Nicholas Hewitt a donné des commentaires pertinents (2). Bien avant Trémolet de Villers, Gide lui-même avait refusé une interprétation littérale du texte pour y déceler un élément ludique et satirique (3). Et l’on sait que certains, à l’instar de Maurice Bardèche, préfèrent qualifier de satires (au moins Bagatelles) ces écrits qui ne répondent pas précisément à la définition donnée par les dictionnaires du terme « pamphlet » (4).
On peut aussi penser qu’en adoptant cette forme, Céline s’est en quelque sorte piégé lui-même, ne parvenant pas toujours à se faire prendre au sérieux ni par ses adversaires, ni par ses thuriféraires. À l’un de ceux-ci, il s’en est expliqué : « J’aurais pu donner dans la science, la biologie où je suis un peu orfèvre. J’aurais pu céder à la tentation d’avoir magistralement raison. Je n’ai pas voulu. J’ai tenu à déconner un peu pour demeurer sur le plan populaire (5). » Après 1945, cette « déconnade » constituera un bouclier précieux face aux attaques. Comment prendre en considération et dès lors condamner un antisémitisme qui a les apparences de la rigolade ? De la même façon, certains, figurant dans le même camp, lui témoignèrent une condescendance amusée, jugeant l’énergumène outrancier ou frivole.
Certes, Trémolet n’a pas tort : Bagatelles se veut une œuvre littéraire. Doublement même puisque ce livre déploie un manifeste esthétique. Mais c’est aussi un écrit de combat stigmatisant ce que Céline nomme les « juifs synthétiques », c’est-à-dire les aryens sans culture, aliénés, colonisés. « L’Art n’est que race et patrie », s’écriera-t-il dans Les Beaux draps, appelant alors de ses vœux un sursaut de la part d’un peuple dont il flétrit le manque de réactivité. Vis comica à l’appui, Céline espère conjurer, convaincre et susciter avant d’être repris par un pessimisme foncier.


Marc LAUDELOUT



Notes

1. Jacques Trémolet de Villers, « Le siècle juif ? » [à propos du livre de Yuri Slezkine, Le Siècle juif, La Découverte, 2009], Présent, 10 février 2010.
2. Nicolas Hewitt, « L’antisémitisme de Céline. Historique et culte de la blague » in Études inter-ethniques, Annales du CESERE (Centre d’Études supérieures et de Recherches sur les Relations ethniques et le Racisme), n° 6, Paris, Université Paris XIII, 1983. Repris dans Le Bulletin célinien, n° 215, décembre 2000, pp. 13-21.
3. André Gide, « Les Juifs, Céline et Maritain », La Nouvelle revue française, 1er avril 1938.
4. Ce terme désignant un texte court, ce qui, hormis Mea culpa, n’est pas la caractéristique des écrits en question. (« Bagatelles était une satire, une sorte d’Île des Oiseaux, comme dans Rabelais. », dixit Maurice Bardèche, Louis-Ferdinand Céline, La Table ronde, 1986, p. 180).
5. Lettre à Henri-Robert Petit datant de 1938 in L’Année Céline 1994, Du Lérot-IMEC Éditions, 1995, p. 76.

"Acéphale": The Headless Monster of "Modern" Masculinity

Jack DONOVAN:
Acéphale
The Headless Monster of "Modern" Masculinity

acephale_gf.jpgIn 1936, while staying at the coastal village of Tossa de Mar with artist
André Masson, George Bataille envisioned the Acéphale, pictured above. The Acéphale was a headless monster who symbolized man's rejection of hierarchy and God and his escape from the boredom of civilization into a life lost to the pursuit of fascination. Bataille was determined to bring about his leaderless, communal, ecstatic age of chaos through a sacred conjuration, and to this end he formed a secret society. As the tale goes, members of the Acéphale Society performed clandestine rituals -- one notably celebrating the decapitation of Louis XVI. However, the true conjuration sacrée required a human sacrifice. To bring about a new age of the crowd, of survivors held "in the grip of a corpse," someone needed to become the Acéphale. Someone needed to lose his head.

It never happened.

But it may as well have, because modern man has truly lost his head.

Modern man has the body of a Man. He has manly strength, sinew, reflexes and appetites. But he lacks direction, purpose, an ideal. He lacks virtus -- manly virtue. Modern man, like any freshly beheaded corpse, twitches and thrashes about destructively without his head to guide him. I cannot help but see this, and in observing this gruesome, sloppy spectacle I stand aghast alongside feminists and other "modernizers" of masculinity. However, I know that while headless, modern man is a monster -- a beast -- it is idealized, fully embodied and focused that Man is most fearsome and awe inspiring. Modern man flails about because he is ultimately impotent. Traditional Man is terrifyingly potent.

Masculinity has always changed. Men have been writing and speaking and arguing about what makes a man throughout history. As the particulars of a society change, the prevailing model of masculinity becomes more nuanced or more brutal according to need.

When men helmed Western civilization, they maintained a smooth continuity through changing times because they knew themselves. They knew what men were, they knew what men could -- and could not -- become. They knew what stirred their own souls, they knew how to speak to each other and reach common ground. They knew the kinds of ideas that would take their own hearts and move them into battle with swords or muskets, in animal skins or sharp uniforms. They knew that in peacetime men could not be ruled by fear alone, that masculine ideals and codes of honor would reveal both the stronger and the nobler aspects of a man even when he was not being watched. Men were able to carve a hard jaw, a stern brow and a proud, noble chin for mankind because they knew themselves. They knew how to shape a head that fit the body of a Man. Embodied Man had a rich and sustaining bloodline; he lived and thrived in the context of history and Tradition.

"Modern," headless man has no life-sustaining bloodline. Women and men with counter-masculine, alien, anti-Western agendas have successfully severed him from his history of heroes, ideals and the world of masculine Tradition. Traditional Man is their fearsome enemy, the agent of their supposed oppression and the Man to blame for all violence and what they call injustice. Their project is one of ressentiment --to cast the heroic Traditional man as the ultimate villain, and to ennoble their own set of "virtues" as the ideal.

(T)he problem with the other origin of the "good," of the good man, as the person of ressentiment has thought it out for himself, demands some conclusion. It is not surprising that the lambs should bear a grudge against the great birds of prey, but that is no reason for blaming the great birds of prey for taking the little lambs. And when the lambs say among themselves, "These birds of prey are evil, and he who least resembles a bird of prey, who is rather its opposite, a lamb,-should he not be good?" then there is nothing to carp with in this ideal's establishment, though the birds of prey may regard it a little mockingly, and maybe say to themselves, "We bear no grudge against them, these good lambs, we even love them: nothing is tastier than a tender lamb."

-- Friedrich Nietzsche, On the Genealogy of Morality


The wealth and luxury of the modern world have made possible an age of the lamb, and oh how the eagle is cursed!

Women, the
weakest men, men with an exploited sense of chivalry and misguided advocates for men are struggling to fashion a sheep's head for the eagle. But that project, too, is an unnatural, bloodless monstrosity. Frankenstein's work. The head doesn't fit. The body of Man rejects it, shrugs it off and remains headless. The enemies of Men toil under the assumption that the age of the sheep will last forever, and that the eagle must don a sheep's head if he is to survive at all.

Forever is a very long time.

The project for Traditional Man is first an archeological one. He venture out onto the lake of ice and recovers the frozen remains of Man's severed head. What follows is an anthropological project. He must study
paleo-masculinity; he must reverse engineer the head and understand the mechanics of masculinity as it functioned before Man's beheading. He must understand what came before, and repair his connection with his bloodline.

The sheep are crafting a world and a "modern" masculinity meant only for sheep. Eagles have no place in it.

But the age of sheep can't last forever. It is artificially ordered, unbalanced, unsustainable. The meek have inherited the earth, but by the very nature of their meekness they will be unable to keep it.

Traditional Man must find and keep his head, his manhood's redoubt. It is difficult to find and walk a path of honor in a world that is hateful to honor. It's a lonely path. But ultimately, every man is alone with his Honor.


Ennio Morricone is playing.


Eventually, an Interphase will come.

And another Age of Eagles.
Jack Donovan

Jack Donovan

Jack Donovan is a poor, blue-collar man made out of muscle and blood who moonlights as an advocate for the resurgence of patriarchal, paleo-masculine values among the Men of the West. He is a contributor to The Spearhead, as well as the author of Androphilia and co-author of Blood Brotherhood and Other Rites of Male Alliance. Mr. Donovan lives and works in Portland, Oregon.

lundi, 29 mars 2010

Louis Ferdinand Céline - An Anarcho-Nationalist

Louis Ferdinand Céline — An Anarcho-Nationalist 

Tom Sunic 

March 24, 2010 

In his imaginary self-portrayal, the French novelist Louis-Ferdinand Céline (1894–1961) would be the first one to reject the assigned label of anarcho-nationalism. For that matter he would reject any outsider’s label whatsoever regarding his prose and his personality. He was an anticommunist, but also an anti-liberal. He was an anti-Semite but also an anti-Christian. He despised the Left and the Right. He rejected all dogmas and all beliefs, and worse, he submitted all academic standards and value systems to brutal derision.

Briefly, Céline defies any scholarly or civic categorization. As a classy trademark of the French literary life, he is still considered the finest French author of modernity — despite the fact that his literary opus rejects any academic classification. Even though his novels are part and parcel of the obligatory literature in the French high school syllabus and even though he has been the subject of dozens of doctoral dissertations, let alone thousands of polemics denouncing him as the most virulent Jew-baiting pamphleteer of the 20th century, he continues to be an oddity eluding any analysis, yet commanding respect across the political and academic spectrum. 

Can one offer a suggestion that those who will best grasp L.F. Céline must also be his lookalikes — the replicas of his nihilist character, his Gallic temperament and his unsurpassable command of the language?   

Cadaverous Schools for Communist and Liberal Massacres     

The trouble with L.F. Céline is that although he is widely acclaimed by literary critics as the most unique French author of the 20th century and despite the fact that a good dozen of his novels are readily available in any book store in France, his two anti-Semitic pamphlets are officially off limits there.  

Firstly, the word pamphlet is false. His two books, Bagatelles pour un massacre (1937) and Ecole des cadavres (1938), although legally and academically rebuked as “fascist anti-Semitic pamphlets,” are more in line with the social satire of the 15th century French Rabelaisian tradition, full of fun and love making than modern political polemics about the Jewry. After so many years of hibernation, the satire Bagatelles finally appeared in an anonymous American translation under the title of Trifles for a massacre, and can be accessed online 

 Louis-Ferdinand Céline

The anonymous translator must be commended for his awesome knowledge of French linguistic nuances and his skill in transposing French argot into American slang. Unlike the German or the English language, the French language is a highly contextual idiom, forbidding any compound nouns or neologisms. Only Céline had a license to craft new words in French. French is a language of high precision, but also of great ambiguities. Moreover, any rendering of the difficult Céline’s slangish satire into English requires from a translator not just the perfect knowledge of French, but also the perfect knowledge of Céline’s world.  

Certainly, H.L. Mencken’s  temperament and his sentence structure sometimes carry a whiff of Céline. Ezra Pound’s toying with English words in his radio broadcasts in fascist Italy also remind  a bit of Céline’s style. The rhythm ofHarold Covington’s narrative and the violence of his epithets may remind one a wee of Celine’s prose too.  

But in no way can one draw a parallel between Céline and other authors — be it in style or in substance. Céline is both politically and artistically unique. His language and his meta-langue are unparalleled in modern literature.

To be sure Céline is very bad news for Puritan ears or for a do-good conservative who will be instantly repelled by Céline’s vocabulary teeming as it does with the overkill of metaphorical “Jewish dicks and pricks.”        

Trifles is not just a satire. It is the most important social treatise for the understanding of the prewar Europe and the coming endtimes of postmodernity. It is not just a passion play of a man who gives free reign to his emotional outbursts against the myths of his time, but also a visionary premonition of coming social and cultural upheavals in the unfolding 21st century. It is an unavoidable literature for any White in search of his heritage.     

These weren’t Hymie jewelers, these were vicious lowlifes, they ate rats together… They were as flat as flounders. They had just left their ghettos, from the depths of Estonia, Croatia, Wallachia, Rumelia, and the sties of Bessarabia… The Jews, they now frequent the guardhouse, they are no longer outside… When it comes to crookedness, it is they who take first place… All of this takes place under the hydrant! with hoses as thick as dicks! beside the yellow waters of the docks… enough to sink all the ships in the world…in a décor fit for phantoms…with a kiss that’ll cut your ass clean open…that’ll turn you inside out. 

The satire opens up with imaginary dialogue with the fictional Jew Gutman regarding the role of artistry by the Jews in the French Third Republic, followed by brief chapters describing Céline’s voyage to the Soviet Union.  

Between noon and midnight, I was accompanied everywhere by an interpreter (connected with the police). I paid for the whole deal… Her name was Natalie, and she was by the way very well mannered, and by my faith a very pretty blonde, a completely vibrant devotee of Communism, proselytizing you to death, should that be necessary… Completely serious moreover…try not to think of things! …and of being spied upon! nom de Dieu!…

…The misery that I saw in Russia is scarcely to be imagined, Asiatic, Dostoevskiian, a Gehenna of mildew, pickled herring, cucumbers, and informants… The Judaized Russian is a natural-born jailer, a Chinaman who has missed his calling, a torturer, the perfect master of lackeys. The rejects of Asia, the rejects of Africa… They were just made to marry one another… It’s the most excellent coupling to be sent out to us from the Hells. 

When the satire was first published in 1937, rare were European intellectuals who had not already fallen under the spell of communist lullabies. Céline, as an endless heretic and a good observer refused to be taken for a ride by communist commissars. He is a master of discourse in depicting communist phenotypes, and in his capacity of a medical doctor he delves constantly into Jewish self-perception of their physique... and their genitalia. 

The peculiar feature of Céline narrative is the flood of slang expressions and his extraordinary gift for cracking jokes full of obscene humors, which suddenly veer off in academic passages full of empirical data on Jews, liberals, communists, nationalists, Hitlerites and the whole panoply of famed European characters. 

But here we accept this, the boogie-woogie of the doctors, of the worst hallucinogenic negrito Jews, as being worth good money!… Incredible! The very least diploma, the very least new magic charm, makes the negroid delirious, and makes all of the negroid Jews flush with pride! This is something that everybody knows… It has been the same way with our own Kikes ever since their Buddha Freud delivered unto them the keys to the soul!  

Mortal Voyage to Endtimes  

In the modern academic establishment Céline is still widely discussed and his first novels Journey to the End of the Night and Death on the Installment Plan are still used as Bildungsroman for the modern culture of youth rebellion. When these two novels were first published in the early 30’s of the twentieth century, the European leftist cultural establishment made a quick move to recuperate Céline as of one of its own. Céline balked. More than any other author his abhorrence of the European high bourgeoisie could not eclipse his profound hatred of leftist mimicry.  

Neither does he spare leftists scribes, nor does he show mercy for the spirit of “Parisianism.” Unsurpassable in style and graphics are Céline’s savaging caricatures of aged Parisian bourgeois bimbos posturing with false teeth and fake tits in quest of a rich man’s ride. Had Céline pandered to the leftists, he would have become very rich; he would have been awarded a Nobel Prize long ago.  

In the late 50’s the bourgeoning hippie movement on the American West Coast also tried to lump him together with its godfather Jack Kerouac, who was himself enthralled with Céline’s work. However, any modest reference to hisBagatelles or Ecole des Cadavres has always carefully been skipped over or never mentioned. Equally hushed up is Céline’s last year of WWII when, unlike hundreds of European nationalist scholars, artists and novelists, he miraculously escaped French communist firing squads or the Allied gallows.    

His endless journey to the end of the night envisioned no beams of sunshine on the European horizon. In fact, his endless trip took a nasty turn in the late 1944 and early 1945, when Céline, along with thousands of European nationalist intellectuals, including the remnants of the French pro-German collaborationist government fled to southern Germany, a country still holding firm in face of the oncoming disaster. The whole of Europe had been already set ablaze by death-spitting American B17’s from above and raping Soviet soldiers emerging in the East. These judgment day scenes are depicted in his postwar novels D’un château l’autre (Castle to Castle)  and Rigodoon.   

Céline’s sentences are now more elliptic and the action in his novels becomes more dynamic and more revealing of the unfolding European drama. His novels offer us a surreal gallery of characters running and hiding in the ruins of Germany. One encounters former French high politicians and countless artists facing death — people who, just a year ago, dreamt that they would last forever. No single piece of European literature is as vivid in the portrayal of human fickleness on the edge of life and death as are these last of Céline’s novels.  

But Céline’s inveterate pessimism is always couched in self-derision and always stung with black humor. Even when sentenced in absentia during his exile inDenmark, he never lapses into self pity or cheap sentimentalism. His code of honor and his political views have not changed a bit from his first novel.  

Upon his return to France in 1951, the remaining years of Céline’s life were marred by legal harassment, literary ostracism, and poverty. Along with hundreds of thousands Frenchmen he was subjected to public rebuke that still continues to shape the intellectual scene in France. Today, however, this literary ostracism against free spirits is wrapped up in stringent “anti-hate” laws enforced by the thought police —  70 years after WWII! Stripped of all his belongings, Céline, until his death, continued to use his training as a physician to provide medical help to his equally disfranchised suburban countrymen.  Always free of charge and always remaining a frugal and modest man.

Tom Sunic (http://www.tomsunic.info; http://doctorsunic.netfirms.com) is author, translator, former US professor in political science and a former diplomat. His new book, Postmortem Report: Cultural Examinations from Postmodernity, prefaced by Kevin MacDonald, has just been released.Email him.

 

Permanent link: http://www.theoccidentalobserver.net/authors/Sunic-Celine...

mercredi, 24 mars 2010

Muray est grand et Luchini est son prophète

Muray est grand et Luchini est son prophète

Philippe-Muray_2334.jpgSamedi, 15 h, théâtre de l’Atelier. Fabrice Luchini vient tranquillement s’assoir près d’une table couverte de livres. La salle est comble. Il avait déjà enchanté les fans de grands textes avec ses lectures de Nietzsche, de La Fontaine et d’autres auteurs de calibre. Il s’attèle cette fois-ci à l’œuvre de Philippe Muray, l’écrivain contempteur de la société hyperfestive et des rebellocrates, polémiste de haut vol disparu en 2006.

Dès la première phrase, le public est conquis. La lecture de Luchini est, pour Muray, plus qu’un hommage, une seconde vie. L’évidence s’impose. Une alchimie s’est produite entre l’impertinence géniale de l’écrivain et l’insolence talentueuse du comédien. Le phrasé unique de ce dernier, sa force d’évocation sans égale donnent toute sa plénitude au texte assassin. Face au règne du Grotesque, usurpateur, c’est un tyrannicide littéraire de la bêtise contemporaine.

Ce qui fait de cette dernière un sujet inédit, selon Muray, c’est le triste mérite d’ajouter, aux formes éternelles du ridicule, l’esprit de sérieux qui suinte aujourd’hui en permanence du nihilisme content de soi.

C’est l’étalage surréaliste, la mise en scène autocentrée de l’Homo Festivus, si fier de succéder à l’homme de l’Histoire et de la différenciation. Aussi, à travers la parole jubilatoire de Luchini, l’auteur de L’Empire du Bien a-t-il à cœur de ne rater aucune de ses cibles. Sa verve énergique volatilise ainsi le culte infantéiste, la peur de la maturité et les fantasmes régressifs qui les traduisent. Son brio décapant pulvérise l’émergence des « agents d’ambiance » et autres « accompagnateurs petite enfance », ces nouveaux emplois créés par Martine Aubry en curieuse amatrice de sots métiers. 

En fin analyste des ressorts profonds du romantisme, il met à jour la démission du bobo ordinaire devant le tragique de la vie, refusant par là-même la frontière pourtant féconde entre beauté et laideur, dignité et petitesse. Les modulations de la voix de Luchini donnent alors tout l’écho mérité au propos lucide de Muray, quand il arrache souverainement le masque du Bien à la banalité du mal, aux petits intérêts sordides qui ne s’avouent plus à eux-mêmes, faute de référent.

Sous les tirs ajustés de cet auteur de grande race, l’époque nous apparaît bel et bien sans l’emballage habituel. On patauge dans le pathos, le moralisme de terreur, le théâtre de rue, le « sourire de salut public », la manie du débat à tout propos, où l’on disserte démocratiquement, avec un minimum d’encadrement médiatique tout de même, d’objets sans consistance définie : un peu de tout et beaucoup de rien.

Si cette liberté de ton vous enthousiasme, n’hésitez pas, le 22 ou le 29 mars, à vous rendre au théâtre de l’Atelier. Un artisan du verbe y célèbre un maître du pamphlet. Muray est grand, et le temps d’une lecture inspirée, Luchini est son prophète.

Philippe Gallion

Texte paru sur le blog du Choc du mois [1] sous le titre « Muray par Lucchini ».


Article printed from :: Novopress.info France: http://fr.novopress.info

URL to article: http://fr.novopress.info/53263/muray-est-grand-et-luchini-est-son-prophete/

URLs in this post:

[1] Choc du mois: http://blogchocdumois.hautetfort.com/archive/2010/03/16/muray-par-luchini.html

lundi, 22 mars 2010

Del rapporto tra volo e scrittura in Saint-Exupéry

saintEX.jpgDel rapporto tra volo e scrittura in Saint-Exupéry

Autore: Fiorenza Licitra /

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

Robert Brasillach, scrittore e critico cinematografico del secolo scorso, rimproverò Saint-Exupéry di aver scritto della sua esperienza d’aviatore, asserendo che solo chi non ha esperito un mestiere e la sua arte sia in grado di parlarne con semplicità e stupore, al contrario di chi, conoscendoli bene, tende più a infiorare il racconto di sfarzi.

Come a dire che la caccia al leone può raccontarla meglio un animalista che un Hemingway.

L’autore del Volo di notte non ha bisogno di apologie, ha già fatto da sé spiegando all’ingenuità di Brasillach che un mestiere non è il risultato di una serie di regole contenuta in un manuale tecnico e non è neanche un’esperienza esteriore che vive di resoconti teorici, ma è  più la storia intima di un’azione fisica e sensuale.

Quello su cui a tal proposito vale la pena riflettere è la stretta connessione che c’è tra il volo e la scrittura, che non sono mondi dispari ed estranei, ma talmente affini da essere metafora l’uno dell’altra.

E’ grazie alle pagine di Saint-Exupéry che, se non si apprende la tecnica del volo, se ne vive tuttavia l’intima riflessione, la sospensione dal tempo e il legame con lo spazio.

Dalle sue rotte sospese l’aviatore-scrittore crea «una topografia celeste, più importante di quella terrestre, d’ordine quasi occulto, poiché si esprime solo attraverso i segni»: interpreta così le curve delle dune, decifra il colore della sabbia – scuro o tenero per un atterraggio di fortuna -, scopre che di notte la nebbia è una forma di luce e che le bianche pieghe del mare insegnano l’avversità del vento.

Accostandosi al misterioso linguaggio della natura, il cui alfabeto muto è denso di significati e di rimandi, stringe un tessuto di relazioni con il mondo grazie al quale «una pianura si fa più verde e diventa più pianura, un villaggio più villaggio».

Saint-Exupéry sa che apprendere un nuovo linguaggio, sottostando a quelle che sono le regole del gioco – tradotte a volte anche nei colpi di fucile dei Mauri – sia la vera meta del viaggiatore, a differenza del semplice turista che, ancorato alle sue convenzioni, dei luoghi coglie solo l’esotico e il pittoresco, gli aspetti più insignificanti del viaggio.

E’ nella scrittura che il pilota francese trasferisce la dialettica appresa in cielo: nei suoi racconti come nei suoi romanzi si trova la visione perspicua del mondo, la relazione con la notte e i suoi abissi, o quella con il deserto del Sahara, che delinea l’infinita ricerca del senso attraverso la simbologia del viaggio e il viaggio nella simbologia.

La letteratura non è forse questo? Non è la dimensione in cui l’uomo manifesta, mediante la parola scritta, la sua imperscrutabile relazione simbolica con il mondo? In Saint-Exupéry lo è senz’altro.

L’autore, senza utilizzare gerghi tecnici, traccia nero su bianco la rotta di stelle percorsa durante le traversate, affidando alle pagine il proprio sentimento di tenerezza per la sera che scende sulla città, che lo schianta molto più di quanto oserebbe la paura di un pericolo imminente, quella del vuoto e della morte.

A sostenere il suo lungo volo così come i suoi versi – è molto probabile che sia un poeta – è la necessità interiore, la cui voce si sente appena nel frastuono delle distrazioni e nelle abitudini indotte, ma che diviene forte e chiara quando un uomo è solo.

Ecco un altro aspetto sostanziale che accomuna il pilota allo scrittore: la solitudine di chi passeggia tra gli astri, in cerca di “un’unica stella su cui abitare”, è della stessa pasta di quella di chi prova a disegnare sulla mappa di un foglio bianco un fiume capace di toccare ogni regione del suo pensiero e ogni paese in cui dimora un sentimento. E’ una solitudine fatta d’inquietudine, di strade ignote e volti lontani, ma anche di fitte relazioni con il circostante al quale ci si accosta più facilmente quando lo si pensa, lo si immagina, lo si sente interiormente.

Infine quello che lega indissolubilmente i due mestieri, o meglio le due arti, dell’uomo Saint-Exupéry è il sogno: il pilota, che dal cielo immagina una donna in particolare o le schiene doppie dei cammelli, sogna allo stesso modo dello scrittore che, impugnando una penna, segue una visione più forte del vero.

Saint-Exupéry troverà la morte nel Luglio del 1944, mentre sorvola l’Île de Riou, a sud di Marsiglia. Nonostante le lunghe ricerche, durate anni, il suo corpo non è mai stato ritrovato, ma è normale che sia così: non lo troverete in fondo al mare, ma sul pianeta del Piccolo Principe a guardare – quando la malinconia lo coglierà forte – quarantatré tramonti in compagnia di una rosa.

Per il resto del tempo sarà più facile scorgerlo mentre «si esercita agli attrezzi tra le stelle», come quell’equilibrista del volo e della scrittura che fu.

Non bisogna cercarlo in fondo al mare, non è laggiù; più facile, invece, sarà trovarlo mentre si esercita agli attrezzi tra le stelle, come quell’equilibrista del simbolo che è.

mercredi, 17 mars 2010

Nouveautés sur le blog http://lepolemarque.blogspot.com

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Les articles de Laurent Schang

Joseph Kessel en Sibérie

Entretien avec Jean-Dominique Merchet: "Nous sortons de l'époque des guerres faciles"

 

 

dimanche, 14 mars 2010

La correspondance de Céline en Pléiade

La correspondance de Céline en Pléiade

Nonfiction.fr, 25/01/2009 : “Être de la Pléiade” est une des grandes obsessions littéraires des dernières années de Céline, “fameuse idée” qui lui vient dès 1956, et dont il sera question dans une bonne partie de ses lettres à Gaston Gallimard : “Les vieillards, vous le savez, ont leurs manies. Les miennes sont d’être publié dans La Pléiade.” C’est chose faite un an après sa mort, et parachevée par la parution de cette anthologie, qui rassemble 50 ans de correspondances, dont une partie inédite. Avec ce volume, la maison Gallimard met la dernière pierre à son entreprise de réédition des correspondances céliniennes . Céline aura pourtant donné du fil à retordre à ses fondateurs. S’il rend hommage à la NRF de l’avoir généreusement accueilli, c’est pour préciser entre parenthèses “avec 20 ans de retard”. La veille de sa mort, cet enragé menace Gallimard, s’il n’augmente pas les termes de son contrat, de louer un tracteur et de “défoncer la NRF”. Constamment persuadé d’être floué, il reproche à Gallimard de ne pas faire assez de publicité pour ses livres, de ne pas le remercier pour sa dédicace dans Féerie pour une autre fois, de ne pas répondre assez vite à ses lettres, mais trouve en celui-ci un interlocuteur à sa mesure, qui ne se laisse nullement démonter par ses lettres les plus déchaînées : “Vraiment Céline, vous m’étonnez, en vous lisant j’ai cru lire du Jarry.”

Il faut dire que le monde littéraire n’a jamais eu les faveurs de Céline. Au fil de ses lettres, il balance, à droite à gauche, ces “petites vacheries acidulées” dont il a le secret. La littérature est “cette grande partouze des vanités” dans laquelle les éditeurs, “parasites goulus”, les prix littéraires, “crise de grande canaillerie”, les “confrères”, vaniteux et jaloux, “Si tu veux voir les pires abrutis d’un pays, demande à voir les écrivains” écrit-il à Milton Hindus, sont l’objet d’une détestation particulière. Céline, “la première vache du pré Denoël”, “le cheval courageux qui a tiré toute sa cargaison de navets”, serait la proie de toutes les jalousies depuis la sortie du Voyage : son entrée trop éclatante en littérature fait de lui “la bête à abattre”.

Ça commençait plutôt bien, pourtant : aux antipodes du héros de Mort à Crédit, ses lettres d’enfance envoyées à ses parents lors de ses séjours linguistiques en Angleterre et en Allemagne, dressent le portrait d’un fils aimant et attentionné, qui apprend le piano et le violon “avec ardeur”, remercie ses parents pour les sacrifices qu’ils font pour lui, et compte les jours qui le séparent de leurs retrouvailles. On est étonné par l’autorité qui se dégage de ces lettres, où Destouches multiplie descriptions caustiques et adresses sentencieuses. À 15 ans, alors que sa tante Joséphine est sur le point de mourir, il recommande à sa mère de soutenir son oncle “En un mot, puisque tout espoir est perdu, cherche à lui préparer une autre vie plutôt que de le consoler de la présente.” L’appareil critique est attentif à repérer les motifs qui nourriront la future œuvre célinienne, y compris les plus prosaïques : les pardessus, les cols de chemise, l’abcès de la mère, le cresson, et surtout la traversée de la Manche, ancêtre de l’épique traversée en mer de Mort à Crédit. Second temps, le front, “spectacle d’horreurs”, “odyssée lamentable”, qui met en scène Céline en soldat courageux et patriote, récompensé de la médaille militaire, bien différent du Bardamu du Voyage. Le souvenir de la guerre apparaît dans la correspondance avec Joseph Garcin, autre ancien combattant de 14, comme le déclencheur de l’écriture, rempart à l’oubli, résistance à la dislocation des choses : “Vous le savez mon vieux, sur la Meuse et dans le Nord et au Cameroun j’ai bien vu cet effilochage atroce, gens et bêtes et loi et principes, tout au limon, un énorme enlisement – je n’oublie pas. Mon délire part de là.”

Les lettres des années 1930, et la diversité des interlocuteurs avec lesquelles elles sont échangées, constituent autant d’éclairages sur l’itinéraire intellectuel de Céline. Hantise de la décadence, ultrapessimisme mais aussi anti-intellectualisme de plus en plus forcené, antisémitisme larvé jusqu’en 1935, obsessionnel et proliférant dans toutes les correspondances à partir de 1936, en sont les traits les plus saillants. “Je suis ici l’ennemi numéro un des Juifs” se félicite Céline après la parution de Bagatelles pour un massacre, ce qui rend ses tentatives de justification d’après guerre assez dérisoires. Ces années sont également celles de la mise en place d’une figure d’ouvrier des lettres, Céline s’appliquant, comme il le fera toute sa vie, à désamorcer tous les clichés romantiques de la création littéraire : “Cette sorte d’état second, joie créatrice soi-disant ! Quelle merde !” Écrire, c’est avant tout “gagner du pèze”, pour “se tirer d’embarras matériels”. Les termes d’œuvre, et même de manuscrit sont écartés, au profit d’un vocable plus prosaïque : “blot”, “ours”, “machin”, “monstre”. Céline, qui signait ses lettres d’Afrique “des Touches”, se réclame à présent du peuple. Intéressante à ce titre la comparaison entre les lettres à Joseph Garcin, aventurier un peu voyou, proxénète à ses heures uni à Céline par les souvenirs de 14 et une “camaraderie de bordel” et à Élie Faure, jusqu’à leur rupture en 1935. “Vous êtes au nerf – vous accrochez la vie, comme moi vous êtes curieux, vous savez le prix des choses, vous n’êtes pas allé au lycée commun.” écrit-il au premier en 1933, et dans une de ses dernières lettres à Faure : “Vous ne savez pas ce que je sais. Vous avez été au lycée.” Ce rejet du lycée, de la culture scolaire, est lié à une conception de l’écriture du côté du nerf, de la viande, de la fibre, qui, débarrassée des médiations savantes, puise dans l’émotion directe, poétique à laquelle se greffe la problématique antisémite : pour Céline, Proust écrit “tarabiscoté” parce qu’il est juif, et encombré d’un trop-plein de médiations culturelles .

Autre période où l’épistolier se montre particulièrement prolifique : les années d’exil au Danemark. La plainte, et son revers, l’agression, forment la véritable toile de fond de la correspondance. En 1945, il commente ainsi son sort, alors que Le Monde a publié dès avril 1945 les premiers témoignages des rescapés des camps nazis : “Je crois que rien d’aussi monstrueux aucun fanatisme aussi enragé ne se soit jamais abattu sur une sorte d’hommes, ni juifs, ni chrétiens, ni communards n’ont connu une unanimité d’Hallali aussi impeccable.” Le ton est donné : l’Histoire est passée au filtre des récits délirants, des haines obsessionnelles qui font de Céline une victime sacrificielle, aux prises avec une “ménagerie de monstres” déchaînés. Son séjour au Danemark est transfiguré en un tableau qui tient à la fois de Shakespeare, de Breughel, et d’Ensor : La Baltique : “La Baltique est pas regardable. La Sépulcrale je l’appelle et les bateaux rares, des cercueils, les voiles : des crêpes.” Staegersallee, où il a logé : “C’est le nid, le repaire, la taverne des sorcières maléficieuses” ; Karen Jensen, qui l’a hébergé : “une sorcière de Macbeth, en plus pillarde, canaille”. Korsor, où il habite trois ans, “une sévérité de mœurs et de paroles et d’allure à faire crever 36 Calvins”.

Les correspondances sont également l’espace où s’élabore bien avant les Entretiens avec le professeur Y, un art poétique “égrené en images” . Images connues du “métro émotif” ou du “bâton tordu”, mais aussi images de l’écriture en “forêt tropicale”, pleine de lianes à abattre, en château à extirper d’une “sorte de gangue de brume et de fatras”, en “statue enfouie dans la glaise” à nettoyer, déblayer. À certains privilégiés, Céline expose les éléments maîtres de sa poétique : le rendu émotif, “Je sais bien l’émotion avec les mots, je ne lui laisse pas le temps de s’habiller en phrase”, la musique, la danse, demandant à son traducteur de respecter “le rythme dansant du texte”, “toujours au bord de la mort, ne pas tomber dedans”. On retrouve dans ces lettres tout ce qui fait le génie du style célinien, dans une version brute, impulsive, surexcitée – on sait que Céline, s’il était conscient de la valeur de sa correspondance, ne retravaillait pratiquement pas ses lettres. C’est encore lui qui parle le mieux du célèbre style Céline. Dans une lettre à la NRF de 1949, il expose ainsi ses ambitions littéraires : “rendre la prose française plus sensible, raidie, voltairisée, pétante, cravacheuse et méchante”, “style surtendu”, composé de “menues surprises”, d’infimes torsions de la langue, et d’une superposition aussi savante qu’instinctive des registres les plus divers.

Car Céline sait faire toutes les voix, et c’est pourquoi malgré la monotonie de ses plaintes et de ses colères, il lasse rarement son lecteur : il parle tantôt comme un moraliste du XVIIe siècle, égrenant sentences pascaliennes et aphorismes de son cru, tantôt comme un maquereau. Sur l’amour, par exemple, ce “bouquin que nous achetons tous à un moment de notre vie”. Non que ce soit un sujet sur lequel il convient de discourir : “Le sexe dure trois secondes. On en écrit pendant trois siècles – Quelle histoire !” Mais quand Marie Canavaggia, sa secrétaire et l’une de ses principales correspondantes, commet le tort de s’aventurer sur un terrain sentimental, Céline s’il se prétend retiré des affaires, tient à rappeler une fois pour toutes qu’il est de l’“école Cascade”, et oppose aux sentiments “accessoires et froufrouteurs” de Marie son propre idéal de santé et sa vigueur de ton. “La vie est trop courte pour se torturer d’abstinences idiotes et les hommes organisent les privations et les tortures avec trop de zèle pour que j’y ajoute des rosaires ! et des rosières ! Foutre Dieu non ! Seulement la force manque ! Les femmes ont des réserves sensuelles ‘tropicales’ ne l’oubliez pas, les plus prudes, les plus réservées et les plus piaffants lovelaces ne sont à leurs côtés jamais que de miteux velléitaires.” On est quasiment dans du Laclos quand elle lui demande de lui retourner ses lettres et qu’il s’exécute, maussade. “Ramassez toute cette brocaille !” intime-t-il à la malheureuse.

La variété des registres produit des effets comiques, parfois involontaires. Le 7 février 1935, Céline envoie deux lettres, la première, assez élégiaque, à Karen Jensen, une amie danoise : “Poésie d’abord Karen, et poésie c’est continuité d’une histoire qui va si possible de l’enfance à la mort”. L’autre à son traducteur, John Marks, en prévision d’un voyage à Londres : “Préparez-moi, mon vieux, un cul bien anglais pour ce séjour.” À travers ces lettres, c’est un vaste spectacle à plusieurs voix qui est mis en scène, où le tragique côtoie bien souvent le grotesque. La guerre est une “ignoble tragédie”, son procès une comédie où son avocat se prend pour une actrice, et Céline lui-même tantôt clown, tantôt “vieil acrobate vieillard qui remonte au trapèze”, quand au Danemark, il se remet à écrire, tantôt moraliste observateur de ce spectacle des vanités.

Ces correspondances constituent à la fois un observatoire de choix sur le parcours de Céline et la genèse des romans, et par la virtuosité du style, une pièce même de l’œuvre célinienne. L’appareil critique est particulièrement riche et éclairant, même si une notice présentant les principales figures de cette galerie de correspondants aurait pu apporter plus de commodité à une lecture souvent complexe. “Serrer au plus près l’énigme Céline”, comme le propose Henri Godard dans sa préface, n’est pas pour autant l’élucider. 1936 constitue le seuil à partir duquel un noyau obscur, harangues antisémites et paranoïa galopante, résiste à toute logique. Il y a l’amertume du Goncourt raté et de la mauvaise réception de Mort à Crédit. Il y a aussi que la pulsion, la violence forment le carburant de l’écriture romanesque, et pas seulement des pamphlets. Autoproclamé écrivain de la haine, Céline s’est cependant toujours refusé à reconnaître ce à quoi l’expression des siennes l’a amené à participer

Camille KOSKAS

Louis-Ferdinand Céline, Lettres, Gallimard Pléiade, 2009.
Merci à Pierre L.

samedi, 13 mars 2010

Tout sur Céline, chaque jour...

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Tout sur Céline, chaque jour:

le Bulletin célinien n°317/mars 2010

Le Bulletin célinien n°317 - mars 2010

Au sommaire:
- Marc Laudelout :
Bloc-notes
- M. L. : « Céline dans Tovaritch » (suite)
- Robert Le Blanc & Étienne Nivelleau : « Autour de la correspondance »
- *** : « Trois céliniens commentent Lettres »
- Pierre Lalanne : « Albert Paraz, l’homme-orchestre »
- Albert Paraz : « D’un château l’autre » [1957]
- Jacques Aboucaya : « Paraz à découvrir »
- *** : « Albert Paraz et L’Express »
- P.-L. Moudenc : « La correspondance de Céline à Paraz ».

Un numéro de 24 pages, 6 € franco.

Le Bulletin célinien
B. P. 70
B 1000 Bruxelles 22
Belgique

C’est un documentaire attrayant que la Société Européenne de Production a réalisé sur Céline à la demande du Conseil général des Hauts-de-Seine(1). Il s’intègre dans une série de portraits de personnalités ayant vécu dans cette partie de la petite couronne d’Île-de-France. Ce ne sont pas seulement les dix dernières années de la vie de l’écrivain qui sont traitées dans ce film, même si elles sont naturellement privilégiées. Au moyen d’images d’archives, c’est tout l’itinéraire de l’écrivain qui est retracé. L’ensemble, de belle facture, s’ouvre par des prises de vues aériennes, excusez du peu, de la « Villa Maïtou ». Autre intérêt du film : on peut y voir une belle brochette de « céliniens historiques », François Gibault, Henri Godard, Philippe Alméras, Frédéric Vitoux — plus le benjamin de l’équipe, David Alliot. Chacun, dans le style qui lui est propre, évoque l’homme et l’œuvre. Des témoins interviennent également : Christian Dedet (écrivain et médecin comme lui), Geneviève Frèneau (sa voisine à Meudon), Judith Magre (élève du cours de danse de Lucette), Madeleine Chapsal (qui réalisa la fameuse interview que l’on sait). Des extraits des trois entretiens télévisés (Dumayet, Parinaud, Pauwels) sont égrenés tout au long du film. De la belle ouvrage assurément.
Fallait-il choisir comme conseiller historique Fabrice d’Almeida, auteur à succès d’un livre sur La vie mondaine sous le nazisme ? Dans ce film, il ne craint pas d’affirmer que, sous l’Occupation, « l’antisémitisme de Céline contribue et va dans le sens de l’extermination qui est en cours ». Pour être sûr d’être bien compris, il ajoute : « Qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : Céline a même dit qu’il fallait liquider les juifs ». C’est, on le voit, aller beaucoup plus loin que tous les céliniens très critiques à l’égard du pamphlétaire. Qu’ils l’acceptent ou non, ceux qui interviennent dans le film se voient ainsi indirectement associés aux affirmations de cet historien. L’un de ceux-ci évoqua jadis « le problème du sens à donner au langage paroxystique célinien »(2). Tout le problème est là, en effet. C’était à propos de la fameuse lettre à Alain Laubreaux parue dans Je suis partout en 1941. Céline concluait de la sorte : « Cocteau décadent, tant pis ! Cocteau, Licaïste, liquidé ! ». Si on met cette lettre en parallèle avec celle que Céline adresse à Cocteau lui-même peu de temps après, la perspective n’est plus exactement la même(3).
Il faut noter que ce documentaire va connaître une importante audience puisqu’il est d’ores et déjà commercialisé sous la forme d’un coffret DVD. Il va en outre être diffusé sur trois chaînes de télévision(4). C’est dire le retentissement qu’auront les dires d’Almeida. On peut penser que cette question épineuse aurait méritée d’être plutôt traitée par les biographes de l’écrivain(5).

Marc LAUDELOUT


Notes
1. Céline à Meudon (2009). Réalisation : Nicolas Craponne. Producteur : Société Européenne de Production à la demande du Conseil général des Hauts-de-Seine pour la collection « Un lieu, un destin ». Durée : 52’.
2. Philippe Alméras, « Quatre lettres de Louis-Ferdinand Céline aux journaux de l’Occupation », French Review, avril 1971. Repris dans Philippe Alméras,
Sur Céline, Éditions de Paris, 2008, pp. 11-23.
3. Lettre de Céline à Jean Cocteau in Cahiers Céline 7 (« Céline et l’actualité, 1933-1961 »), Gallimard [ Les Cahiers de la Nrf ], 2003, pp. 230-231.
4. Les chaînes « TV5 Monde », « Histoire » et France 5. Par ailleurs, le coffret a été envoyé dans les établissements scolaires, les bibliothèques et médiathèques des Hauts-de-Seine. Il est vendu (45 €) dans les musées départementaux. Les autres écrivains évoqués dans cette collection sont Chateaubriand, Charles Péguy et Paul Léautaud. Le DVD seul sera vendu 12 €. Le film peut être vu sur le site www.vallee-culture.fr ainsi que sur le blog
http://lepetitcelinien.blogspot.com.
5. Sur ce sujet, voir, par exemple, ce qu’écrit Claude Duneton : « Il est bien malaisé d’apprécier sans passion, et sur de justes balances, l’état d’esprit qui régnait à l’époque. Malgré tout ce que l’on a pu dire ensuite, le public – dont Céline faisait partie – n’avait guère le moyen de connaître, sur le moment même, les horreurs qui étaient en train de se commettre dans les camps nazis. Que l’on fût pro-hitlérien ou résistant, personne ne pouvait imaginer à quelles lugubres extrémités conduisait la haine raciale… » (
Bal à Korsør. Sur les traces de Louis-Ferdinand Céline, Grasset, 1994).

samedi, 27 février 2010

Michel Tournier: parcours philosophique

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995

Michel Tournier: parcours philosophique

 

tournier.jpgMichel Tournier est un écrivain qui compte et son œuvre peut être abordée selon de multiples perspec­tives. Jean-Paul Zarader a choisi celle de la philosophie dans une étude intitulée Vendredi ou la vie sauvage de Michel Tournier: un parcours philosophique. Il donne ainsi ses raisons: «Cet ouvrage a voulu prendre au sérieux l'affirmation de Michel Tournier: “Je n'écris pas pour les enfants, j'écris de mon mieux. Et quand j'approche mon idéal, j'écris assez bien pour que les enfants aussi puissent me lire”. On s'est donc appliqué a lire Vendredi ou la vie sauvage  et à en esquisser un commentaire, sans ja­mais se référer à cette première version que constitue Vendredi ou les limbes du Pacifique. Quant au caractère philosophique du commentaire, il résulte d'une simple évidence: c'est que nul ne peut, le voudrait-il, se renier. Or Tournier est philosophe de formation et, loin de renier la philosophie, il n'a ja­mais cessé de la considérer comme la racine de son œuvre littéraire». Cet essai est suivi d'un entretien inédit avec Michel Tournier dont nous citerons un des propos: «Le principal enseignement de l'ethnographie, qui débouche sur l'idéalisme, est qu'il n'y a pas la Civilisation et le reste des sauvages, mais des civilisations, parmi lesquelles la nôtre, celle de la France de 1995 qui ne sera pas tout à fait la même que celle de la France de 1996. Et puis, il y a la civilisation des Eskimos, des Pygmées, des Papous... Il faut étudier ces civilisations. Le drame, c'est que la civilisation occidentale moderne a pour effet de détruire toute autre civilisation qui l'approche. Ainsi les Eskimos, qui avaient une civilisation solide et cohérente dans un milieu très défavorable, se sont effondrés dès lors que les Américains les ont touchés» (Jean de Bussac).

 

Jean-Paul ZARADER, Vendredi ou la voie sauvage de Michel Tournier: un parcours philosophique, Editions Vinci, 1995, (135-141, rue du Mont-Cenis, F-75.018 Paris), 222 pages, 110 FF.

samedi, 20 février 2010

Céline vient de débarquer

celine_1_louis-ferdinand-celine-0045_1262086184.jpgCéline vient de débarquer...

Lucien Rebatet

Ex: http://zentropa.splinder.com/

"Quand un matin du début de novembre 1944, le bruit se répandit dans Sigmaringen : « Céline vient de débarquer », c’est de son Kränzlin que le bougre arrivait tout droit. Mémorable rentrée en scène. Les yeux encore pleins du voyage à travers l’Allemagne pilonnée, il portait une casquette de toile bleuâtre, comme les chauffeurs de locomotive vers 1905, deux ou trois de ses canadiennes superposant leur crasse et leurs trous, une paire de moufles mitées pendues au cou, et au-dessus des moufles, sur l’estomac, dans une musette, le chat Bébert, présentant sa frimousse flegmatique de pur parisien qui en a bien connu d’autres. Il fallait voir, devant l’apparition de ce trimardeur, la tête des militants de base, des petits miliciens : « C’est ça, le grand écrivain fasciste, le prophète génial ? » Moi-même, j’en restais sans voix.  Louis-Ferdinand, relayé par Le Vigan, décrivait par interjections la gourance de Kränzlin, un patelin sinistre, des Boches timbrés, haïssant le Franzose, la famine au milieu des troupeaux d’oies et de canards. En somme, Hauboldt était venu le tirer cordialement de ce trou, et Céline, apprenant l’existence à Sigmaringen d’une colonie française, ne voulait plus habiter ailleurs.

La première stupeur passée, on lui faisait fête. Je le croyais fini pour la littérature. Quelques mois plus tôt, je n’avais vu dans son Guignol’s Band qu’une caricature épileptique de sa manière (je l’ai relu ce printemps, un inénarrable chef d’œuvre, Céline a toujours eu dix, quinze ans d’avance sur nous). Mais il avait été un grand artiste, il restait un grand voyant.  Nous nous sommes rencontrés tous les jours pendant quatre mois, seul à seul, ou en compagnie de La Vigue, de Lucette, merveilleuse d’équilibre dans cette débâcle et dans le sillage d’un tel agité. Céline, outre sa prescience des dangers et cataclysmes très réels, a été constamment poursuivi par le démon de la persécution, qui lui inspirait des combinaisons et des biais fabuleux pour déjouer les manœuvres de quantités d’ennemis imaginaires. Il méditait sans fin sur des indices perceptibles de lui seul, pour parvenir à des solutions à la fois aberrantes et astucieuses. Autour de lui, la vie s’enfiévrait aussitôt de cette loufoquerie tressautante, qui est le rythme même de ses plus grands bouquins. Cela aurait pu être assez vite intolérable. Mais la gaité du vieux funambule emportait tout.

Le « gouvernement » français l’avait institué médecin de la colonie. Il ne voulait d’ailleurs pas d’autre titre. Il y rendit des services. Abel Bonnard, dont la mère, âgée de quatre-vingt-dix ans, se mourait dans une chambre de la ville, n’a jamais oublié la douceur avec laquelle il apaisa sa longue agonie. Il pouvait être aussi un excellent médecin d’enfants. Durant les derniers temps, dans sa chambre de l’hôtel Löwen, transformée en taudis suffocant (dire qu’il avait été spécialiste de l’hygiène !) il soigna une série de maladies intrinsèquement célinesques, une épidémie de gale, une autre de chaudes-pisses miliciennes. Il en traçait des tableaux ébouriffants.  L’auditoire des Français, notre affection le ravigotaient d’ailleurs, lui avaient rendu toute sa verve. Bien qu’il se nourrît de peu, le ravitaillement le hantait : il collectionnait par le marché noir les jambons, saucisses, poitrines d’oies fumées. Pour détourner de cette thésaurisation les soupçons, une de ses ruses naïves était de venir de temps à autre dans nos auberges, à l' « Altem Fritz », au « Bären », comme s'il n'eût eu d'autres ressources, partager la ration officielle, le « Stammgericht », infâme brouet de choux rouges et de rutabagas. Tandis qu'il avalait la pitance consciencieusement, Bébert le « greffier » s'extrayait à demi de la musette, promenait un instant sur l'assiette ses narines méfiantes, puis regagnait son gîte, avec une dignité offensée.

— Gaffe Bébert ! disait Ferdinand. Il se laisserait crever plutôt que de toucher à cette saloperie... Ce que ça peut être plus délicat, plus aristocratique que nous, grossiers sacs à merde ! Nous on s'entonne, on s'entonnera de la vacherie encore plus débectante. Forcément !

Puis, satisfait de sa manœuvre, de nos rires, il s'engageait dans un monologue inouï, la mort, la guerre, les armes, les peuples, les continents, les tyrans, les nègres, les Jaunes, les intestins, le vagin, la cervelle, les Cathares, Pline l'Ancien, Jésus-Christ. La tragédie ambiante pressait son génie comme une vendange. Le cru célinien jaillissait de tous côtés. Nous étions à la source de son art. Et pour recueillir le prodige, pas un magnétophone dans cette Allemagne de malheur ! (Il en sort à présent cinquante mille par mois chez Grundig pour enregistrer les commandes des mercantis noyés dans le suif du « miracle » allemand.)

Dans la vaste bibliothèque du château des Hohenzollern Céline avait choisi une vieille collection de la Revue des Deux Mondes, 1875-1880. Il ne tarissait pas sur la qualité des études qu'il y trouvait : « Ça, c'était du boulot sérieux... fouillé, profond, instructif... Du bon style, à la main... Pas de blabla. » C'est la seule lecture dont il se soit jamais entretenu devant moi. Il était extrêmement soucieux de dissimuler ses « maîtres », sa « formation ». Comme si son originalité ne s'était pas prouvée toute seule, magnifiquement.

De temps à autre, quand nous nous promenions tous deux sans témoin, le dépit lui revenait de sa carrière brisée, mais sans vaine faiblesse, sur le ton de la gouaille :
— Tu te rends compte ? Du pied que j'étais parti... Si j'avais pas glandé à vouloir proférer les vérités... Le blot que je me faisais... Le grand écrivain mondial de la « gôche »... Le chantre de la peine humaine, de la connarderie absurde... Sans avoir rien à maquiller. Tout dans le marrant, Bardamu, Guignol, Rigodon... Prix Nobel... Les pauvres plates bouses que ça serait, Aragon, Malraux, Hemingway, près du Céline... gagné d'avance... Ah ! dis donc, où c'est que j'allais atterrir !... « Maî-aître »... Le Nobel... Milliardaire... Le Grand Crachat... Doctor honoris causa... Tu vois ça d'ici !

Bien entendu, il ne fut pas question un seul instant d’employer Céline à une propagande quelconque, hitlérienne ou française. Moi-même, tout à fait indifférent aux bricolages « ministériels », je passai l’hiver à compulser les livres d’art du Château et à grossir le manuscrit de mon roman, les Deux Etendards.

Nous devions en grande partie ces privilèges à notre ami commun, le cher Karl Epting, qui avait dirigé l’Institut allemand à Paris, le vrai lettré européen, demeuré d’une francophilie inaltérable, même après les deux années de Cherche-Midi dont il paya.

Outre  cette amitié précieuse, la mansuétude de tous les officiers allemands était acquise à Céline. Et il la fallait très large, pour qu’ils pussent fermer leurs oreilles à ses sarcasmes. Car Louis-Ferdinand était bien le plus intolérant, le plus mal embouché de tous les hôtes du Reich. Pour tout dire, il ne pardonnait pas à Hitler cette débâcle qui le fourrait à son tour dans de si vilains draps. C’était même le seul chapitre où il perdît sa philosophie goguenarde, se fît hargneux, méchant. Par réaction, par contradiction, l’antimilitariste saignant du Voyage se recomposait un passé, une âme de patriote à la Déroulède. Ah ! l’aurai-je entendu, le refrain de son fait d’armes des Flandres, « maréchal des logis Destouches, volontaire pour une liaison accomplie sous un feu d’une extrême violence », et du dessin qui l’avait immortalisé à la première page de l’Illustré National.

– En couleurs… Sur mon gaye… Au galop, le sabre au vent… Douzième cuirassier !... Premier médaillé militaire sur le champ de bataille de la cavalerie française… C’est moi, j’ai pas changé. Présent !... qui c’est qui me l’a tiré ma balle dans l’oreille ? C’est pas les Anglais, les Russes, les Amerlos… J’ai jamais pu les piffer, moi les Boches. De les voir se bagotter comme ça partout, libres, les sales « feldgrau » sinistres, j’en ai plein les naseaux, moi, plein les bottes !

– Mais enfin, Louis, tu oublies. Ils sont chez eux, ici !

– J’oublie pas, j’oublie pas, eh ! fias ! C’est bien la raison… Justement… Les faire aux pattes, sur place ! Une occasion à profiter, qui se retrouvera pas… Au ch’tar, les Frizons, tous, les civils comme les griviers. Au « Lag », derrière les barbelés, triple enceinte électrique… Tous, pas de détail. Voilà comment je la vois, moi, leur Bochie.

Il écumait, réellement furieux. Alors qu’il reniflait des traquenards sous les invites les plus cordiales, qu’il se détournait d’un kilomètre pour éviter une voiture dont le numéro ne lui paraissait « pas franc », il se livrait devant les Allemands à son numéro avec une volupté qui écartait toute prudence. Karl Epting avait projeté de constituer, pour notre aide, une Association des intellectuels français en Allemagne. Un comité s’était réuni, à la mairie de Sigmaringen. Céline y avait été convié, en place d’honneur. Au bout d’une demi-heure, il l’avait transformée en pétaudière dont rien ne pouvait plus sortir.

Un dîner eut lieu cependant le soir, singulièrement composé d’un unique plat de poisson et d’une kyrielle de bouteilles de vin rouge. De nombreuses autorités militaires et administratives du « Gau » s’étaient faites inviter, friandes d’un régal d’esprit parisien. Il y avait même un général, la « Ritterkreuz » au cou. Céline, qui ne buvait pas une goutte de vin, entama un parallèle opiniâtre entre le sort des « Friquets », qui avaient trouvé le moyen de se faire battre, mais pour rentrer bientôt chez eux, bons citoyens et bons soldats, consciences nettes, ne devant des comptes à personne, ayant accompli leur devoir patriotique, et celui des « collabos » français qui perdaient tout dans ce tour de cons, biens, honneur et vie. Alors ; lui, Céline, ne voyait plus ce qui pourrait l’empêcher de proclamer que l’uniforme allemand, il l’avait toujours eu à la caille, et qu’il n’avait tout de même jamais été assez lourd pour se figurer que sous un pareil signe la collaboration ne serait pas un maléfice atroce. Mais les hauts militaires avaient décidé de trouver la plaisanterie excellente, ils s’en égayèrent beaucoup, et Ferdinand fut regretté quand il alla se coucher.

Les Allemands passaient tout à Céline, non point à cause de ses pamphlets qu'ils connaissaient mal, mais parce qu'il était chez eux le grand écrivain du Voyage, dont la traduction avait eu un succès retentissant. Le fameux colonel Boemelburg lui-même, terrible bouledogue du S.D. et policier en chef de Sigmaringen, s'était laissé apprivoiser par l'énergumène. Il fallait bien d'ailleurs que Céline fût traité en hôte exceptionnel pour être arrivé à décrocher le phénoménal « Ausweis », d'un mètre cinquante de long, militaire, diplomatique, culturel et ultra-secret, qui allait lui permettre, faveur unique, de franchir les frontières de l'Hitlérie assiégée.

Il n'avait pas fait mystère de son projet danois : puisque tout était grillé pour l'Allemagne, rejoindre coûte que coûte Copenhague, où il avait confié dès le début de la guerre à un photographe de la Cour son capital de droits d'auteur, converti en or, et que ledit photographe avait enterré sous un arbre de son jardin. L'existence, la récupération ou la perte de ce trésor rocambolesque n'ont jamais pu être vérifiées. Mais sur la fin de février ou au début de mars, on apprit bel et bien que Céline venait de recevoir le mythique « Ausweis » pour le Danemark.

Deux ou trois jours plus tard, pour la première fois, il offrit une tournée de bière, qu'il laissa du reste payer à son confrère, le docteur Jacquot. À la nuit tombée, nous nous retrouvâmes sur le quai de la gare. Il y avait là Véronique, Abel Bonnard, Paul Marion, Jacquot, La Vigue, réconcilié après sa douzième brouille de l'hiver avec Ferdine, deux ou trois autres intimes. Le ménage Destouches, Lucette toujours impeccable, sereine, entendue, emportait à bras quelque deux cents kilos de bagages, le reliquat sans doute des fameuses malles, cousus dans des sacs de matelots et accrochés à des perches, un véritable équipage pour la brousse de la Bambola-Bramagance. Un lascar, vaguement infirmier, les accompagnait jusqu'à la frontière, pour aider aux transbordements, qui s'annonçaient comme une rude épopée, à travers cette Allemagne en miettes et en feu. Céline, Bébert sur le nombril, rayonnait, et même un peu trop. Finis les « bombing », l'attente résignée de la fifaille au fond de la souricière. Nous ne pèserions pas lourd dans son souvenir. Le train vint à quai, un de ces misérables trains de l'agonie allemande, avec sa locomotive chauffée au bois. On s'embrassa longuement, on hissa laborieusement le barda. Ferdinand dépliait, agitait une dernière fois son incroyable passeport. Le convoi s'ébranla, tel un tortillard de Dubout. Nous autres, nous restions, le cœur serré, dans l'infernale chaudière. Mais point de jalousie. Si nous devions y passer, du moins le meilleur, le plus grand de nous tous en réchapperait.
                  
Lucien REBATET, Mémoires d’un fasciste II, Pauvert, 1976, p. 218 – 224.

lundi, 11 janvier 2010

Camus, con Jünger e la Arendt sta a pieno titolo nel "nostro" pantheon

camus.jpgCamus, con Jünger e la Arendt sta a pieno titolo nel "nostro" pantheon

 Articolo di Luciano Lanna
Ex: http://robertoalfattiappetiti.blogspot.com/
Dal Secolo d'Italia, edizione domenicale del 3 gennaio
A cinquant'anni dalla prematura scomparsa per un incidente stradale, il presidente Sarkozy ha pensato di trasferire le spoglie di Albert Camus al Pantheon e in Francia è esplosa una vivace polemica. Tutta di natura politica. L'omaggio è stato considerato un affronto da parte di qualcuno. Tuttavia Catherine Camus, la figlia della scrittore che gestisce l'eredità del padre, ha comunque spiegato: «Camus è un uomo pubblico e i suoi libri appartengono a tutti. Io non voglio imporre nulla a nessuno, non sono la guardiana del tempio, anche perché il tempio non esiste...». E in questo senso qualcosa di simile si è registrata anche in Italia, dove il quotidiano la Repubblica ha dedicato un'inchiesta di Simonetta Fiori a una nuova destra politica e culturale - «libertaria e non autoritaria, riformatrice e non conservatrice, democratica e non populista» - il cui profilo emerge evidente proprio per il fatto che «adotta Albert Camus tra i propri Lari».
Lo scrittore e pensatore francese di cui domani, 4 gennaio, ricorre il cinquantenario della morte, veniva affiancato su Repubblica accanto a figure a lui apparentabili come Simone Weil, Hannah Arendt, Bruce Chatwin o Jürgen Habermas. E alle quali si potevano senz'altro accostare anche Ernst Jünger, Indro Montanelli, Arthur Koestler, Ignazio Silone, André Malraux, George Orwell, Raymond Aron... Personalità del secolo scorso che si sono contraddistinte per il fatto di aver "attraversato" criticamente il Novecento, essersi abbeverati alle sue passioni incandescenti, ma che a un certo punto sono riusciti a prendere le distanze da quelle tempeste a cui essi stessi avevano partecipato. Jünger, ad esempio, arrivando a scrivere un romanzo-metafora contro la degenerazione totalitaria di quel nazionalismo che lo aveva visto entusiasta da adolescente come Sulle scogliere di marmo, partecipando al fallito putsch contro Hitler e lavorando teoricamente, nel secondo dopoguerra, per un libertarismo spiritualista. Allo stesso modo Koestler, Silone, Malraux e Orwell ribaltarono gli entusiasmi giovanili per il comunismo nel più coerente impegno intellettuale antitotalitario. Ma Albert Camus fu senz'altro più precoce e più incisivo di tutti gli altri. Aderì ad Algeri, dove trascorse gran parte della sua gioventù, alla locale sezione del partito comunista nel 1934, a ventuno anni. Ma lo fece solo per occuparsi delle rivendicazioni e dei diritti della popolazione araba. Ma si dimette già nel 1935: i motivi di dissenso erano già tanti, ma fu soprattutto la posizione dei comunisti favorevole alla repressione poliziesca contro Messali Hadj, leader del movimento indipendentista Etoil Nord Africaine, a fargli intravvedere come inevitabile la rottura. Non a caso Albert, che intanto si è laureato in filosofia, sceglie un'altra via per il suo impegno politico: insieme a un gruppetto di intellettuali delle varie etnie algerine fonda una Casa della cultura con l'obiettivo di dar vita a quello che potremmo chiamare il "libertarismo mediterraneo". «Al suo tempo - ricorda sua figlia Catherine - la maggior parte degli intellettuali francesi erano dei borghesi che avevano frequentato le migliori scuole. Lui era diverso e per di più veniva dall'Algeria, in un'epoca in cui la Francia guardava soprattutto al Nord, rimuovendo la sua dimensione mediterraneo. Per lui invece la mediterraneità era importante. Amava moltissimo anche la Spagna, la Grecia e soprattutto l'Italia. Per lui il mare e il sole erano fondamentali. Ha anche scritto che gli sarebbe piaciuto morire sulla strada che sale verso Siena...». Morì invece in Francia, sulla strada Sens-Parigi, per un fatale incidente d'auto quel 4 gennaio del 1960. La macchina era una Facel-Vega, alla guida Michel Gallimard, editore. «Albert Camus, scrittore, nato il 7 novembre del 1913 a Mondovi, dipartimento di Costantine (Algeria)», c'era scritto sulla carta d'identità ritrovatagli in una tasca della sua giacca.
Aveva scritto da qualche parte che non gli sarebbe spiaciuto morire in una camera d'albergo, libero da qualsiasi «senso di possesso». Non amava le facili rassicurazioni, le comode ossessioni identitarie, i feticci della modernità. E restò fino alla fine coerente con questi suoi assunti. Alla notizia dell'incidente, l'allora ministro della Cultura francese, André Malraux, spedisce immediatamente un segretario a ritirare la borsa di Camus. Nella borsa c'è un manoscritto, centoquaranta fogli coperti da una scrittura fitta: è il romanzo Il primo uomo. La casa editrice decise di non pubblicarlo perché politicamente non opportuno. Eppure quel romanzo era la risposta di Camus alla questione algerina, che dal 1954 lacerava la Francia, l'Algeria e l'Europa, e che fu storicamente il primo laboratorio di quei conflitti che, a cinquant'anni da quell'incidente automobilistico, agitano i nostri tempi.
D'altronde è un dato storico che negli anni Sessanta, alla vigilia di quella contestazione studentesca di Berkeley che anticipò il nostro Sessantotto, gli universitari tenevano sul comodino due livre de chevet: Sulla rivoluzione di Hannah Arendt e L'uomo in rivolta di Albert Camus. In quel fermento studentesco anglosassone, lontano dal marxismo-leninismo e spinto soprattutto sul fronte dei diritti civili, della lotta contro la segregazione razziale e del libertarismo, l'autore di romanzi come Lo straniero e La peste, il giovane premio Nobel nel 1957, veniva letto come uno scrittore "politico" tout court.
Già nel 1946 del resto Camus da giornalista impegnato - cominciò a scrivere prima su Paris Soir poi su Combat dopo la pubblicazione dei suoi primi famosi romanzi - pubblicò una serie di articoli dal titolo «Né vittime né carnefici", in cui delineva una prima critica profondo dello stalinismo e di tutti i totalitarismi. Dal 1949 è tra i promotori di un'organizzazione che si propone di dare aiuto materiali ai dissidenti dei regimi comunisti dell'Est, delle colonie africane in esilio e delle dittature militari. Nel 1950 interviene pubblicamente nel dibattito tra Palmiro Togliatti e Ignazio Silone, di cui è amico, sulla rottura dell'italiano col Pci in nome delle ragioni della libertà. Nel 1951, infine, esce il suo saggio filosofico L'uomo in rivolta che segna la rottura tra lui e Jean-Paul Sartre. «Fu - racconta sua figlia - un vero scandalo, fu accusato di essere di fatto un alleato della destra. Molti si allontanarono da lui. Solo alcuni amici gli rimasero vicini, come Nicola Chiaromonte e Ignazio Silone». Il primo gli restò vicino fino alla fine e lo fece collaborare sin dal 1956 alla rivista Tempo Presente, in nome della comune avversione per il pensiero ideologico: «La cultura non è il terreno - diceva - della verità, ma della disputa intorno alla verità».
Nel 1953, alla notizia della rivolta libertaria di Berlino, Camus prende posizione a favore delle ragioni degli insorti anticomunisti. Tra il 1955 e il 1956 Camus collabora poi al settimanale L'Express con una lunga serie di articoli sulla guerra civile algerina scoppiata nel 1954. Impegnato nella ricerca di una soluzione politica per quella crisi, nel gennaio 1956 torna ad Algeri e Orano sostenendo quei movimenti che lottano per la fine del regime coloniale ma anche per la convivenza etnica, partecipando a diversi comizi. Nel 1957, ancora, scrive Riflessioni sulla ghigliottina, una serie di testi contro la pena di morte, all'epoca ancora in vigore a Parigi come a Washington, a Madrid come ad Algeri.
In Italia, oltre ovviamente ai suoi amici e sodali Silone e Chiaromonte, si interessarono di lui Mario Gozzini sulla rivista papiniana L'Ultima già nel 1948, poi Guido Piovene, i pensatori cattolici Armando Rigobello e Armando Carlini, e i critici letterari Luigi Baccolo e Carlo Bo, accostandolo quest'ultimo alla letteratura di Pierre Drieu La Rochelle. Sul piano generazione, vale quanto scritto a suo tempo da Massimo Fini: «Coloro che, come me, erano adolescenti - ha scritto il giornalista - nella seconda metà degli anni Cinquanta, si sono formati su Sartre e su Camus. Fummo esistenzialisti anche se non sapevamo bene cosa fosse l'esistenzialismo. Da lì nasceva la nostra inclinazione per l'individualismo, il nichilismo, l'assurdo, il libertarismo che, sostanzialmente, non ci ha più abbandonato. Alla rivoluzione preferivamo, con Camus, la rivolta».
Da "destra" comunque nei primi anni Sessanta se ne occupano almeno due libri pubblicati dalle edizioni dell'Albero di Piero Femore: L'uomo in allarme dell'allora giovane critico letterario Fausto Gianfranceschi e Il declino dell'intellettuale di Thomas Molnar. Il primo accostava la rivolta esistenziale evidente negli scritti di Camus a tutti i "ribelli" che dalla letteratura dei "giovani arrabbiati" britannici alla beat generation statunitense stava caratterizzando nei romanzi il bisogno di libertà delle giovani generazioni. Nella figura dello "straniero" di Camus si ravvisava l'escluso «che si pone il problema della libertà, l'uomo che è interessato a sapere come dovrebbe vivere invece di prendere semplicemente la vita come viene». E Gianfranceschi apparentava la figura del Mersault camusiano, il protagonista de Lo straniero, a personaggi letterari contemporanei come il "lupo della steppa" di Herman Hesse o all'outsider di Colin Wilson. Thomas Molnar invece, anche sulla scorta dell'interpretazione del pensatore cattolico (e di destra) Gabriel Marcel, lo avvicinava al connazionale André Malraux: «Si può dire - scriveva - nonostante il loro pensiero sia meno sistematico di quello di Sartre, che abbiamo rappresentato meglio l'umanesimo esistenzialista poiché hanno afferrato e colto le sue motivazioni sotterranee con l'intuizione propria dell'artista». E in particolare su Camus, annotava: «Scrittore più vivo, più caldo, più mediterraneo, rappresenta l'altra faccia del culto dell'azione: la giustificazione dell'impegno quotidiano, di quelle che lui chiama le "fatiche di Sisifo" che conferiscono dignità all'uomo attraverso la schiavitù di un'esistenza media. Anch'egli, senza alcun dubbio, parla dell'artista come di un ribelle che tenta di strappare alla storia i suoi inafferabili valori».
Ma l'impulso libertario di Camus non si è mai crogiolato nella santificazione di un comodo individualismo narcisista. «Visto che non viviamo più i tempi della rivoluzione - scrisse - impariamo a vivere il tempo della rivolta». Ed è anche per questo che Massimo Fini ha concluso: «Il Sartreche che cercava di comiugare esistenzialismo e marxismo non ci finì mai di convincere. Camus, che ebbe la fortuna di morire presto, invece lo amammo sempre. Tutto».
Luciano Lanna, laureato in filosofia, giornalista professionista dal 1992 e scrittore (autore, con Filippo Rossi, del saggio dizionario Fascisti immaginari. Tutto quello che c'è da sapere sulla destra, Vallecchi 2004), oltre ad aver lavorato in quotidiani e riviste, si è occupato di comunicazione politica e ha collaborato con trasmissioni radiofoniche e televisive della Rai. Già caporedattore del bimestrale di cultura politica Ideazione e vice direttore del quotidiano L'Indipendente, è direttore responsabile del Secolo d'Italia. Alcuni suoi articoli sono raccolti su questo blog.

mercredi, 06 janvier 2010

Céline naufragé

celine.jpg6 janvier 1940 : Louis-Ferdinand Céline n’a pas été directement mobilisé en raison des nombreuses blessures qu’il avait reçues pendant la première guerre mondiale. Il a cependant tenu à servir la France en s’engageant comme médecin dans la marine. Le 6 janvier 1940, le navire sur lequel il officie, heurte un bâtiment britannique au large de Gibraltar et fait naufrage. Céline, selon ses propres mots: “a suturé pendant quatorze heures et piqué dans tous les sens – toute la nuit coupaillé ici et là!”.

 

vendredi, 18 décembre 2009

L'insolente Cioran

e_m_cioran.jpgL'insolente Cioran

Dal mensile Area, giugno 2001

«La mia missione è di uccidere il tempo e la sua di uccidermi a sua volta. Ci si trova perfettamente a proprio agio tra assassini». Con questa dichiarata volontà e nella convinzione che «chiunque non sia morto giovane merita di morire» Emile Michel Cioran, poeta, filosofo, saggista ha condotto il suo personalissimo duello con la vita, «il più grande dei vizi», sino al 20 giugno del 1995, giorno in cui è morto a Parigi.

A sei anni dalla scomparsa di questo affascinante esponente della cultura europea del Novecento, arrivano nelle librerie italiane i Quaderni 1957 - 1972. L’opera raccoglie il prezioso contenuto di trentaquattro taccuini, ritrovati dopo la sua morte, ora pubblicati da Adelphi in un ponderoso tomo di oltre mille pagine, per la delizia di noi lettori. Si tratta degli appunti più intimi di uno sferzante fustigatore della modernità, «scettico di servizio in un mondo alla fine», scritti nel lungo arco di tempo che va dal giugno 1957 al novembre 1972. Vi si trovano, tenuti insieme da una scrittura iperbolica e densa di suggestioni incantatrici, riflessioni, sentenze fulminanti, ritratti strabilianti, descrizioni minuziose di significativi episodi vissuti, aneddoti e paradossi. Soprattutto emerge, tra le righe, l’animo inquieto di un artista affamato d’assoluto, di uno spirito religioso senza religione, di uno scrittore lucido e delirante al tempo stesso, che per la sua natura contraddittoria sfugge ad ogni classificazione, tanto da definirsi egli stesso un «idolatra del dubbio, un dubitatore in ebollizione, un dubitatore in trance, un fanatico senza culto, un eroe dell’ondeggiamento».

Francese d’adozione, Cioran rimane uno scrittore di stirpe rumena e sentimenti balcanici. Nasce a Rasinari (Sibiu) in Transilvania l’8 aprile del 1911 e i Carpazi sono i compagni della sua adolescenza. Rimane sempre legato alla «madre patria immersa nella bruma» anche quando nel 1937 decide di lasciare l’insegnamento nei licei e accettare una borsa di studio a Parigi, «piccola Bucarest […] la sola città del mondo dove si poteva essere poveri senza vergogna, senza complicazioni, senza drammi, la città ideale per essere un fallito». Ed infatti la sua vita parigina è caratterizzata da quel modus vivendi studentesco che Robert Brasillach definiva «l’eminente dignità del provvisorio», ben descritto da Mario Bernardi Guardi nella monografia che il mensile Diorama Letterario ha dedicato nel maggio 1991 (n.148) a Cioran, profeta della decadenza: «Provinciale d’ingegno e studente ribaldo, legge e scrive, ma va anche in giro in bicicletta per i Pirenei e la Bretagna. E vive, fino a quarant’anni, da avventuroso adolescente: ha in tasca pochi soldi, dorme negli ostelli, abita nelle soffitte, alloggia negli albergucci, mangia alla mensa universitaria».

Con sofferenza matura la decisione di rinunciare alla sua lingua d’origine per scrivere in francese. «Ho scritto in rumeno fino al ’47. Quell’anno mi trovavo in una casetta a Dieppe, e traducevo Mallarmé in rumeno. Di colpo, mi son detto: Che assurdità! Che senso ha tradurre Mallarmé in una lingua che nessuno conosce? Allora ho rinunciato alla mia lingua. Mi sono messo a scrivere in francese, ed è stato difficilissimo, perché, per temperamento, la lingua francese non mi si addice. Io ho bisogno di una lingua selvaggia, di una lingua da ubriaco. Il francese è stato per me una camicia di forza».

Sono invece in rumeno, questa «mistura di slavo e latino, idioma privo di eleganza ma poetico», le sue opere giovanili. A soli ventitre anni scrive un saggio di «sfida al mondo», Al culmine della disperazione (Adelphi 1998), che riscuote un certo successo e viene premiato.

Nel 1937 pubblica Ascesa della Romania. Vi si scorge un Cioran ancora attento all’attualità politico culturale, persino interventista nel dibattito del suo paese: «Nessuno può dirsi nazionalista se non soffre infinitamente del fatto che la Romania non possiede la missione storica di una grande cultura e che un imperialismo culturale e politico come quello delle grandi nazioni non possa appartenerle; non è nazionalista chi non può credere con fanatismo alla repentina sublimazione della nostra storia». Nello stesso periodo scrive: «La cultura rumena vive attualmente il suo momento decisivo: abbandonare dietro di sé la tragedia di una cultura su piccola scala e, attraverso le sue imprese in materia di teorie, d’arte, di politica e di spiritualità, compiere un destino specificamente aggressivo da grande cultura. Lo sforzo dei rumeni deve dunque mirare a strappare il loro paese dalla periferia della storia per condurlo sul proscenio…».

Insieme a numerose personalità della cultura, come lo storico delle religioni Mircea Eliade, si schiera a fianco della Legione dell’Arcangelo Michele. E’ una stagione brevissima, prevale presto lo scetticismo e la sfiducia in ogni rivoluzione. Anni dopo scriverà: «Ogni progetto è una forma di schiavitù». E anche: «Mi basta sentire qualcuno parlare sinceramente di ideale, di avvenire, di filosofia, sentirlo dire noi con tono risoluto, invocare gli altri e ritenersene l’interprete, perché io lo consideri mio nemico».

Prima di partire per la Francia pubblica a sue spese Lacrime e Santi (Adelphi 1990) e qualche anno dopo il suo ultimo libro in lingua rumena, Il tramonto dei pensieri. Si appassiona a Shakespeare e Baudelaire, a Dostoevskij, agli antichi gnostici, a Buddha e Pascal.

Lo influenzano soprattutto Spengler e Schopenhauer, suo «grande Patrono, boicottato dalla tromba degli utopisti, senza parlare di quella dei filosofi» e Nietzsche. Sono in molti a paragonarlo al grande tedesco, dal filosofo spagnolo Fernando Savater, allievo ed amico di Cioran nonché traduttore delle sue opere e autore della biografia Cioran, un angelo sterminatore (Frassinetti 1998), a Jean François Revel che lo definisce «il solo rappresentante letterariamente riuscito dell’arte dell’aforisma dopo Nietzsche».

Termina presto l’idillio con la filosofia, («ha vinto l’incantesimo della filosofia», scrisse Alain De Benoist), che abbandona per abbracciare «l’esperienza, le cose vissute, la follia quotidiana». Preferisce finire «prima in una fogna che su un piedistallo». Detesta la pedanteria dei filosofi, piuttosto che sposare dogmi vuole demolirne. Ritiene l’erudizione un pericolo mortale per l’umanità. «Il sapere […] ci condurrà inesorabilmente alla rovina», avverte.

Soprattutto Cioran non vuole rinunciare al suo «dilettantismo»: «Se fossi costretto a rinunciarvi è nell’urlo che vorrei specializzarmi». Le sue opere, in effetti, gridano, nell’intento di svegliare le coscienze dal torpore morale: «scuotendole, le preservo dallo snervamento in cui le sommerge il conformismo». In esse vibra un’energia baldanzosa e vitale che stride, solo apparentemente, con la sfiducia di Cioran.

La sua critica pungente si rivolge all’uomo contemporaneo, capace solo di «secernere disastro», alla ragione, «la ruggine della nostra civiltà», alla storia, «indecente miscela di banalità e apocalisse», al progresso, «l’ingiustizia che ogni generazione commette nei confronti di quella che l’ha preceduta» e al colonialismo occidentale nel Terzo Mondo, «l’interesse degli uomini civili per i popoli che vengono chiamati arretrati è molto sospetto, incapace di sopportarsi ancora, l’uomo civilizzato scarica su questi popoli l’eccedenza dei mali che lo opprimono, li incita a condividere le proprie miserie, li scongiura di affrontare un destino che ormai non può più affrontare da solo».

Eppure, pur esprimendo un inconfutabile pessimismo, Cioran non può essere ritenuto semplicisticamente un nichilista. Non si limita ad annunciare la catastrofica fine dell’occidente, ma invita tutti ad una vera e propria rivolta morale. Come ha scritto Bernardi Guardi il suo è comunque un messaggio positivo: «C’è da indietreggiare davanti a tanta copia d’angoscia. Eppure l’umor nero di Cioran, mettendoci in guardia contro tutto, paradossalmente ci insegna a riscoprire tutto, a fare carne e sangue di ogni esperienza, prima fra tutte quella del dolore, della religione, della morte».

C’è in lui, infatti, una robusta vena di sensibilità sociale, scevra di ogni forma di retorica, scarna e proprio per questo più sincera. E’ singolare come tale sentimento conviva con l’aristocratico distacco rispetto alle sorti del mondo che caratterizza questo autore solitario e metafisico.

La sua insofferente misantropia lo porta a scrivere feroci battute come queste: «appena si esce nella strada, alla vista della gente, sterminio è la prima parola che viene in mente […] quando passo giorni e giorni in mezzo a testi in cui si tratta unicamente di serenità, di contemplazione, di spoliazione, mi viene voglia di uscire per la strada e spaccare il muso al primo che incontro». La tolleranza diventa «una civetteria da agonizzanti». Malgrado affermazioni così temerarie Cioran non ha dubbi: «Ci si deve schierare con gli oppressi in ogni circostanza, anche quando hanno torto, senza tuttavia dimenticare che sono impastati con lo stesso fango dei loro oppressori». L’auspicio è quello di un mondo liberato dal lavoro, dove la gente possa «uscire in strada e non fare più nulla. Tutta questa gente abbrutita, che sgobba senza sapere perché, o si illude di contribuire al bene dell’umanità, che fatica per le generazioni future sotto l’impulso della più sinistra delle illusioni, si vendicherebbe allora di tutta la mediocrità di una vita vana e sterile, di tutto questo spreco di energia privo dell’eccellenza delle grandi trasfigurazione».

Per Cioran la scrittura non è un mestiere, ma un atto liberatorio. Si domanda: «Cosa sarei diventato senza la facoltà di riempire delle pagine. Scrivere significa distrarsi dei propri rimorsi e dei propri rancori, vomitare i propri segreti. Lo scrittore è uno squilibrato che si serve di quelle finzioni che sono le parole per guarirsi». Chiamato in numerose università a tenere dei corsi, rifiuta asserendo che ne è incapace, perché «ogni idea mi ripugna nel giro di un quarto d’ora».

In Italia, negli anni del più ortodosso fondamentalismo marxista, i suoi libri sono stati a lungo ignorati, in quanto ritenuti politicamente scorretti. Solo le edizioni del Borghese dettero alla luce due sue opere, Storia e Utopia (1969) e I nuovi Dei (1971), libro, quest’ultimo, ristampato successivamente anche dall’editore Ciarrapico nella bella collana de I classici della controinformazione, diretta da Marcello Veneziani.

Solo diverso tempo dopo ed in Italia soprattutto grazie ad Adelphi, che ne ha tradotto, nel corso degli ultimi quindici anni, quasi tutta l’opera, il grande pubblico ha potuto godere di buona parte dei suoi scritti, tra i quali la stessa Storia e Utopia (ovviamente trascurando di fare riferimenti alle precedenti edizioni), Il funesto demiurgo, L’inconveniente di essere nati, La caduta nel tempo, La tentazione di esistere, Sommario di decomposizione, Sillogismi dell’amarezza, Squartamento e Esercizi di ammirazione.

In questo libro, in particolare, conosciamo un Cioran anomalo, non più sarcastico ma, al contrario, persino generoso nel giudicare alcuni personaggi della cultura suoi contemporanei, tra i quali gli amati Eliade, Borges e De Maistre.

Sul futuro delle sue opere Cioran ha dichiarato: «Il destino dei miei libri mi lascia indifferente. Credo però che qualcuna delle mie insolenze resterà». Noi invece siamo convinti che la sua opera rimarrà di assoluta attualità, così come la sua figura di provocatore “insolente”.

A tal proposito la definizione che Cioran ha dato del grande pensatore reazionario Joseph de Maistre, è per noi, lettori devoti, la più adatta a descrivere proprio il grande rumeno: «Senza le sue contraddizioni, senza i malintesi che, per istinto o calcolo, alimentò sul proprio conto, il suo caso sarebbe stato liquidato da tempo, ed oggi soffrirebbe la disgrazia di essere capito, la peggiore che possa abbattersi su un autore».

mercredi, 09 décembre 2009

Roger Nimier, l'ussare blu delle lettere francesi

Nimier-09bf6(1).pngRoberto Alfatti Appetiti

Http://robertoalfattiappetiti.blogspot.com/

Roger Nimier, l’ussaro blu delle lettere francesi

Dal mensile Area, maggio 2003

Pochi mesi prima dell’incidente stradale del 28 settembre 1962, in cui perse tragicamente la vita, Roger Nimier, in una conversazione con François Billetdoux, disse di aver deciso di diventare scrittore per «esplorare il cuore femminile». Si trattava di una confessione sincera, un po’ spavalda, un po’ autoironica, ma anche di una mezza verità, di un elegante modo per schernirsi. L’affermazione, se da una parte serviva ad alimentare la fama di playboy impenitente, dall’altra gli era utile a dissimulare l’ardente impegno culturale che lo aveva spinto, giovanissimo, a scendere nell’arena delle lettere.

Nimier, parigino di Neuilly-sur-seine, «cattolico bretone», come amava presentarsi con una punta di vanità, discendente dell’antica casata dei conti de la Perrière, sentiva l’esigenza di dover recuperare il tempo perso, avvertiva come una imperdonabile colpa l’essere nato “soltanto” il 31 ottobre 1925, troppo tardi per essere vicino ai confrères collabos, ai vinti, agli ultras maudit, a coloro che in virtù della loro militanza nella collaborazione vennero poi sistematicamente emarginati dal mondo letterario. D’indole impetuosa, animato da un intransigente furore iconoclasta, Roger Nimier si gettò a capofitto nella vita, scegliendo di stare dalla parte sbagliata, quella che aveva appena perso, senza alcuna possibilità di rivincita, la sua battaglia. Di simpatie monarchiche, si era formato leggendo l’Action Française. Nel 1945, mentre la Francia era ancora in festa per la Liberazione, non ancora ventenne, corse ad arruolarsi nel 2° Reggimento Ussari e venne spedito di gran carriera negli Alti Pirenei. L’esilio durò meno di un anno, perché troppo forte era il richiamo della tenzone e, smobilitato, tornò a Parigi. L’unico agone praticabile rimaneva quello letterario, ben più vivace di quello ristagnante e compromissorio della politica. Al riguardo, Paul Morand non mancò mai di mettere in guardia il suo giovane amico: «Niente politica, perché tutto è perduto. Stattene tranquillo». Ma Nimier non era un tipo tranquillo, per lui «un uomo senza progetti è il nemico del genere umano».

A soli ventitré anni esordì presso Gallimard con il suo primo romanzo, Le spade, recentemente pubblicato in Italia, nella traduzione del curatore Massimo Raffaelli, grazie ad una piccola casa editrice padovana, Meridiano Zero. Il libro rappresentò un atto di sfida, una vera e propria dichiarazione di guerra ad un mondo culturale, quale quello francese del secondo dopoguerra, egemonizzato dalla sinistra, intento a tessere le lodi della Resistenza e ad esaltarne la superiorità etico-morale nel nome dell’incarnazione d’ideali indiscutibili. E non poteva esserci un’opera più aggressiva, sfrontata e controcorrente di Le spade, esatta antitesi del modello politicamente dominante di una letteratura ispirata dal dogma della responsabilità sociale dello scrittore. La storia, ambientata nella tumultuosa Parigi di quegli anni, è in buona parte autobiografica. La scrittura è asciutta e apparentemente trascurata, ma nello stesso tempo avvincente, ruvida nella sua sincerità, esplicita, veloce, cinematografica. Soprattutto è gettata sulla carta come una rapsodia, senza mediazioni stilistiche. E’ un lungo delirio nel quale il narratore non si preoccupa di analizzare gli avvenimenti che si susseguono, a coglierne qualche dettaglio, come se i fatti non dipendessero dalla sua stessa volontà e tutto fosse frutto di un copione già assegnato al protagonista, di una scelta già fatta. François Sanders si presenta nelle prime pagine come un ragazzino sensibile e annoiato, la cui attività principale consiste nell’annotare su un diario una minuziosa contabilità del suo onanismo. Vive un rapporto d’amore platonico, pur se progressivamente più sensuale, con la sorella Claude, che nella sottile e delicata ambiguità ricorda le vicende dei cugini René e Florence nel romanzo La ruota del tempo di Robert Brasillach (Edizioni Sette colori). Anche qui si avverte il timore del protagonista nei confronti di una maturità che sembra incombere come una minaccia, attirando su di sé la corruzione dell’ambiente esterno e determinando un fatale allontanamento dall’ideale di purezza insito nella gioventù e la fine della naturale complicità tra i due ragazzi. François inizialmente è attratto dalla Resistenza, ma rimane presto deluso dalla meschinità dei suoi compagni, che lo tradiscono e lui tradirà a sua volta. Il suo sguardo si rivolge altrove: «Nel ’44, Vichy mi rompe più che mai, ma i nazisti mi appassionano. Ho intuito la grandezza della catastrofe tedesca e gli ultimi sforzi del suo genio. Al confronto, i movimenti di resistenza mi parevano meritassero un semplice paragrafo nei manuali di storia. Vedevo in anticipo questo piccolo paragrafo, bianco e gelido, noto appena ai bravi allievi […] Non dubitavo della vittoria dei rossi. Loro portavano con sé la verità della storia – noi avremmo avuto la verità dei vinti, tanto più inebriante. In massa sentivo il nostro popolo rifluire verso i vincitori. E vedevo gli altri, i resistenti di giugno accoglierne le luride truppe a braccia aperte, adularle, adorarle». In una Parigi festante, «che scoppia di stupidità», uccide a caso tra la folla un ebreo, «solo per togliersi un capriccio», per eliminare quello che ritiene un «simbolo della nuova Francia, che mangerà a sazietà, lascerà cartacce sull’erba della domenica […] dunque, ho sparato su un simbolo […] Mi sono sottomesso all’ispirazione, ho sparato, ho sentito il dolce rinculo del calcio sulla spalla. Senza dubbio ho sussurrato: Uno di meno. Perché la buona educazione, che conta, dimostra che si può uccidere la gente senza essere comunque dei bruti». Passa tra le file della Milizia, insieme a «figli di papà in rotta con l’ideale, vecchi fascisti tubercolosi, bretoni amatori della Vandea e qualche pregiudicato – il sale della terra, come si dice». Sanders si trova più a suo agio con i duri. Forgia lui stesso un modo di chiamare Pétain, «vecchio culattone […] espressione che ha spopolato e di cui penso che la Milizia mi sia debitrice». La sua adesione al collaborazionismo è estetica, più che politica, è la sua personale reazione di fronte ad «un paese sprofondato nel disonore e con la vocazione al tradimento». «Più l’apocalisse si avvicinava alla Germania più essa diventava la mia patria […] la Germania, nel ’44, è stata il gran luogo di raduno dei desperados d’Europa. Tutta l’ebbrezza di una disfatta clamorosa e meritata si è presentata davanti a noi. I rossi non erano cattivi. Avevano l’innocenza pronta all’uso e tante altre cose. Noi li ammazzavamo e il buon Dio li accoglieva in paradiso. Mentre noialtri, il nostro Dio dei vinti ci offriva un altro piedistallo. Le notizie arrivavano dai quattro angoli del globo. Le disfatte si ammucchiavano davanti a noi per innalzarci, noi che mai avevamo goduto della vittoria».

Come scrive lo scrittore Eraldo Affinati nella prefazione all’edizione italiana, il collaborazionismo di Sanders-Nimier, che ne avrebbe segnato irrimediabilmente la vita come «un’indelebile cicatrice», consisteva soprattutto in una «faccenda di onore e giacche inamidate, fedeltà e sigarette, colpi sferrati a vuoto verso un nemico nascosto dove meno te l’aspetti». La scelta di arruolarsi era stata compiuta perché «non era facile avere vent’anni nel 1945». Affinati cita l’annotazione che Pierre Drieu La Rochelle aveva apposto sul suo diario: «ho collaborato per non essere altrove, nel gregge che trasudava odio e paura». Stato d’animo, più che motivazione razionale, che si adatta alla perfezione alla «rivolta solitaria» di Sanders, «giovane perduto» che «accarezza la Lüger nella tasca dei pantaloni», avuta da un ufficiale delle SS in cambio «di una boccetta di profumo». Se a Sanders non rimaneva altro che brandire la rivoltella, a Nimier non restava che impugnare la penna, anzi “la spada”. Nel romanzo scrive: «Ho sempre pensato che il mondo racchiuda un gran numero di spade segrete, e che ognuna sia puntata verso un petto […] e tutte quelle spade cercano in effetti un fodero di carne». Provocatorio ed irriverente com’era, dopo la pubblicazione del libro, indossò una piccola spilla a forma di spada e, per essere sicuro degli effetti delle sue insolenze, per irritare ancor di più i resistenti, lui, che era nato nel 1925 ed era ancora un giovane studente del liceo Pasteur negli anni dell’occupazione tedesca, pronunciava con noncuranza frasi come questa: «quando ero nelle Waffen SS…».

Quando lo scrittore Marcel Jouhandeau lesse il romanzo, raccontò che «fu come aver ricevuto uno schiaffo di gloria, di luce». Ed infatti Le spade riscosse un grande successo ed impose il giovane Nimier all’attenzione del mondo letterario parigino. Successo che si ripeté due anni dopo, con L’ussaro blu, romanzo che gli fece sfiorare la vittoria del prestigioso Prix Goncourt.

In pochi anni Nimier “sfoderò” un libro dietro l’altro, tra cui: Il grande di Spagna (1950, dedicato a Georges Bernanos), Perfido (1950), Bambini tristi (1951, tradotto da Alfredo Cattabiani venne pubblicato in Italia nel 1964 per le Edizioni dell’Albero), Storia di un amore (1953, l’edizione italiana, sempre a cura di Longanesi, è del 1962) e, dopo un lungo periodo di inattività («una specie di voto», disse a François Billetdoux), D’Artagnan innamorato ovvero cinque anni prima (l’omaggio a Dumas era ormai in tipografia quando Nimier morì tragicamente e l’opera uscì postuma, pochi mesi dopo la sua morte, mentre in Italia Longanesi la pubblicò nel 1964).

Nimier non si limitò ad esercitare il mestiere di narratore, come direttore editoriale di Gallimard si sentiva in dovere di lottare per riabilitare chi non c’era più, chi non era sopravvissuto, perché era morto o perché, per aver condiviso le sue stesse idee, era stato rimosso, esiliato in un limbo letterario.

Giuseppe Scaraffia, tra i pochi conoscitori italiani di Nimier, ha scritto che «indifferente all’ostracismo della sinistra, rintracciò la sua parentela dispersa dalle epurazioni letterarie». Pubblicò autori dimenticati, come Morand, lo stesso Jouhandeau e Céline, di cui divenne consigliere ed amico, sino ad essere tra i pochi intimi cui fu concesso di accompagnarne le esequie.

Nimier fu anche un brillante critico e polemista, dalle colonne de Opéra, La Table Ronde, La Parisienne e Arts, uno dei più prestigiosi settimanali culturali dell’epoca, e un convincente sceneggiatore cinematografico (firmò, tra l’altro, uno dei tre episodi del film I vinti di Michelangelo Antonioni e, insieme all’amico Louis Malle, Ascensore per il patibolo).

Ma soprattutto fu l’animatore e il capofila di un battaglione di scrittori-intellettuali (tra i quali Jacques Laurent, Michel Déon e Antoine Blondin) che si opponeva aspramente a chi spadroneggiava nel mondo culturale e nelle case editrici, di una vera e propria “fronda” che rifiutava il romanzo esistenzialista, il settarismo e il moralismo del detestato engagement culturale francese, dominato dalla ingombrante presenza di due maître a penser come Sartre e Camus. Fu Bernard Frank, giovane giornalista che in seguito diventerà un affermato opinionista al Nouvel Observateur, a definirli per la prima volta “gli ussari”, in un articolo, Hussard e grognard, pubblicato nel dicembre 1952 su Les Temps modernes, la rivista-partito di Sartre, non pensando di battezzare così una scuola letteraria. Il termine voleva esprimere la loro vivacità, la combattività e persino l’abbigliamento, austero, quasi militare, del leader carismatico del gruppo, Nimier. La loro scrittura disinvolta era tesa a demolire la pretenziosità e la pesantezza dei letterati impegnati. Nelle loro opere gli ussari esprimevano un dichiarato rifiuto del mito della Resistenza e della sua ideologia. Atteggiamento, questo, che gli valse la fama subito di “fascisti”. Didier Sénécal, nel suo Roger Nimier à la tete des hussards (Lire, mars 1999), spiega: «Per il capo incontrastato degli ussari l’obiettivo è semplice: scandalizzare i benpensanti di sinistra e le tre principali componenti di quella intellighentia: gli stalinisti, i sartriani e i lettori de Le Monde. Il suo impegno è quello di rimettere in sella i grandi epurati della liberazione. Gli innocenti, come Jean Giono o Marcel Aymé, ma anche i colpevoli, come Jouhandeau, Chardonne e Céline».
A 37 anni Nimier aveva già raccolto una ricca collezione di nemici. Del resto possedeva tutte le qualità per attirare l’invidia di colleghi ed avversari: era bello, centottantaquattro centimetri di fascino e di muscoli coltivati con la pratica del rugby e della boxe («sono attratto dal sudore e dal sangue, dalla gratuità della cosa. E potermi battere realmente mi sembra stupendo»), era borghese e voluttuosamente mondano, sempre impeccabilmente curato ed elegante, distaccato e ostentatamente cinico, come a segnare ogni volta un preciso quanto invalicabile confine tra lui e il mondo.

Amava girare a bordo delle sue luccicanti auto sportive, con la capote vezzosamente abbassata anche in pieno inverno e un bagaglio essenziale sempre a portata di mano: un pigiama, un rasoio e i volumi del Littré, il più raffinato dizionario di francese. Morand, che pure ne condivideva la passione per le auto di grandi cilindrata, gli ripeteva spesso: «Ti rimprovereranno la Jaguar per tutta la vita, il che è ottimo. Dimenticheranno perfino la tua bellezza e il tuo talento, ma la Jaguar mai».

E fu proprio la sua ultima fuoriserie a tradirlo, in una sera d’autunno. Nonostante l’approssimarsi dell’oscurità, uscendo da Parigi sulla sua Aston Martin DB4, lanciata «a plus de 150 à l’heure», si schiantò contro il parapetto di un ponte del raccordo ovest di Parigi. Nel necrologio che gli dedicò due giorni dopo il Journal du dimanche l’articolista si sentì in dovere di ricordare che lo scrittore «aveva avuto una Jaguar e una Delahaye» e di sottolineare come «le sue vetture erano i suoi giochi preferiti e ne scriveva lungamente nelle sue opere». Infine ricordò che «in uno dei suoi libri aveva già descritto un incidente d’auto mortale». Nel romanzo Bambini tristi, infatti, il suo alter ego, Olivier Malentraide, trova la morte in una circostanza singolarmente analoga: «Olivier spinse la macchina ai 130, passando semafori rossi, evitando al pelo i camion ed i ciclisti. Dopo aver corso per qualche minuto a quella velocità, trovò quel che era venuto a cercare in un grande cantiere dove avevano scavato delle buche profonde…». Accanto a Nimier morì la bellia scrittrice Suzy Durupt, 27 anni, che con lo pseudonimo di Sunsiaré de Larcòn aveva pubblicato con Gallimard, grazie a Nimier, il suo primo ed unico romanzo. «Ha sedotto la morte come le ha sedotte tutte» scrisse Morand.

Ed è con questa uscita di scena improvvisa e violenta che è terminata la corsa di uno de Gli Ultimi dandies (Sellerio 2002), famiglia nella quale l’autore del libro, Scaraffia, colloca a pieno titolo Nimier, racchiudendo in poche righe l’essenza della vicenda umana e artistica di Nimier: «il dandy cerca invano nel volto dei vinti un’eco delle virtù che ama: il distacco degli interessi, l’ebrezza di essere in minoranza, il gusto dell’azzardo e del gioco sempre più stretto con la morte». Sempre per rimanere alle definizioni, specialmente quando sono appropriate, come ha scritto Maurizio Serra ne L’esteta armato (Il Mulino 1991), Nimier era «l’ultimo erede degli esteti armati […] i condottieri del Bello e insieme dell’Azione […] l’aristocrazia sensuale e guerriera che nella civiltà europea degli anni Trenta teorizzò una rivolta contro la decadenza».

Con la sua prematura scomparsa, i “moschettieri”, gli ussari, si sono dispersi nel disimpegno. Nelle librerie francesi sono continuati ad arrivare, postumi, altri libri di Nimier, a testimonianza di una vitalità che non poteva essere contenuta in una vita così breve, anche se intensa.

Nel 1968, con la prefazione dell’amico Paul Morand, quasi a restituire un affettuoso favore e a saldare un debito di riconoscenza, viene pubblicato il romanzo che Nimier aveva scritto ventenne e che era stato rifiutato dalle case editrici, Lo straniero, e altre opere, come Il trattato d’indifferenza, un pamphlet filosofico che raccoglie otto riflessioni scritte negli anni Cinquanta da un cinico che era ben consapevole che «non c’è cinismo senza sentimento», pagine che ci piacerebbe poter leggere presto in italiano. Chi ha orecchie per intendere, chi per passione o mestiere fa l’editore, intenda.

jeudi, 26 novembre 2009

Le Bulletin célinien n°313

Sortie du Bulletin célinien n°313, novembre 2009 :

Au sommaire :
- Marc Laudelout :
Bloc-notes (Céline à l’I.N.A.)
- Jacques Francis Rolland : Roger Vailland l’affabulateur
- M. L. : « Céline & Cie » : une nouvelle collection célinienne
- Eugène Fabre : Justice rendue à Céline (décembre 1961)
- Frédéric Saenen : Incorrect (au sens premier du terme). « Une histoire politique de la littérature ».
- M. L. : Pol Vandromme (« Une famille d’écrivains »)
- M. L. : Le souvenir de Robert Denoël
- M. L. : Louis-Albert Zbinden
- Michel Bergouignan : L.-F. Céline contradictoire et passionné (II)
- François Marchetti : Mort d’un éditeur courageux (Kay Holkenfeldt)
- Céline sur Internet

Le numéro 6€



Le Bulletin célinien
B.P. 70

B 1000 Bruxelles 22

L'art et la guerre: de Céline à H. G. Wells

Paul MODAVE :

L’art et la guerre : de Céline à H. G. Wells

 

Article paru dans « Le Soir », Bruxelles, le 18 juillet 1944

 

Au moment où l’invasion et les bombardements aériens dévastent les cités d’art de l’Occident, l’hebdomadaire français « la gerbe » vient d’ouvrir une enquête auprès des personnalités représentatives des lettres françaises afin d’offrir à celles-ci l’occasion de manifester leur réaction devant le saccage du pays.

 

eglisestjulienenruines.jpgCe qui frappe dans beaucoup de ces réponses, c’est leur réticence. Ainsi M. de Montherlant ne voit dans cette enquête qu’une « recherche académique ». M. Georges Ripert, doyen de la Faculté de Droit de Paris, regrette que « dirigeant une maison où il y a beaucoup de jeunes gens, il lui soit impossible d’accorder d’interview » ; quant à Ferdinand Céline, il répond sans ambages « qu’il donnerait toutes les cathédrales du monde pour arrêter la tuerie », ce qui est une plaisante façon de ne rien dire.

 

Commentant cette enquête dans « L’Echo de la France », M. Robert Brasillach s’exprime en ces termes : « Les professionnels de l’art savent bien, Céline aussi bien entendu, que la destruction des cathédrales ou des palais n’arrêtera pas pour cela la tuerie. Mais voilà, dire qu’on désapprouve  —ce serait bien timide cependant—  la destruction inutile de la beauté du monde, c’est donner des gages à l’Allemagne, paraît-il ! On a passé trente, quarante ans à discuter sur l’art et à plaindre nos civilisations mortelles, mais lorsque les trésors de cet art sont renversés par le souffle des machines à détruire, on se tait. On dira ce que l’on pense après la guerre, bien sûr, nuancé à la couleur du vainqueur, s’il y a un vainqueur et s’il y a une après-guerre ».

 

Et après avoir constaté que le dernier témoignage de liberté d’esprit aura été fourni par les cardinaux de France et de Belgique, M. Brasillach conclut par ses mots : « Aujourd’hui, la parole est aux forces et à leurs rapports. Tout s’est simplifié. Mais on pense seulement que la beauté du monde est chaque jour assassinée, et qu’un univers où risquent de manquer demain, Rouen, Caen, Pérouse, Sienne, Florence, n’est pas un univers dont les artistes, fût-ce par leur silence, aient le droit de se dire fiers. Si le « saint Augustin bouclé », de Benozzo Gozzoli, est détruit, dans ses fresques dorées de San-Gimignano, si la « Charité » ne rayonne plus sur les murailles d’Assise, si, de même qu’on ne peut plus errer au pied des plus nobles façades médiévales de Rostock ou de Hambourg, demain c’est le quai aux Herbes de Gand, qui s’effondre dans le néant où sont déjà les rues rouennaises et les églises de Caen ; et si l’on trouve cela tout naturel et si l’on ne souffre pas dans son cœur de civilisé, alors il me semble qu’on perd le droit de parler de culture et de barbarie, qu’on perd le droit, dans l’avenir, d’affirmer que l’on aime l’Italie, l’art roman, la sculpture française si tendre et si virile, il me semble que le silence qui sert aujourd’hui d’alibi devrait être le silence de toute une vie ».

 

On ne peut pas mieux dire. Mais dans le même moment où les artistes français se montrent si discrets ou si réticents, l’écrivain anglais H.-G. Wells, dans un article paru dans « Sunday Dispatch », bientôt repris dans le périodique « World Review », exprime ainsi son opinion sur la destruction des monuments d’art de l’Italie : « Dans tout ce territoire, il n’y a pas une seule œuvre d’art, à l’exception peut-être de manuscrits pouvant être mis facilement à l’abri, qui ne puisse être entièrement détruite, et l’héritage de l’humanité n’en éprouvera pas la moindre perte en beauté. Nous possédons notamment les maquettes de toutes ces statues qui peuvent être copiées, y compris leur patine ».

 

caen_ruins.jpg

J’espère que nos lecteurs auront savouré comme il convient l’humour  —hélas ! inconscient—  de M. H.-G. Wells. Mais il ne s’agit pas d’une boutade. Pour l’auteur, auteur particulièrement sérieux mais aussi évidemment privé du sens de l’art que l’aveugle du sens des couleurs, ne comptent que les statues cataloguées dont on possède les maquettes ! La qualité originale d’une œuvre, le milieu spirituel dont elle fait partie intégrante, lui échappe avec une certitude indiscutable. Et il le prouve bien lorsqu’il déclare plus loin, avec autant de pédantisme béat que de solennelle bêtise : « L’art et le goût de l’art sont de suprêmes offenses au charme inépuisable des créations de la nature ».

 

 

Alors qu’il n’est que trop évident que l’art est exactement le contraire, c’est-à-dire une action de grâce, un cri d’amour et de reconnaissance devant la beauté de la vie !

 

Au pays basque, au déclin d’une belle journée, il n’est pas rare que des couples de paysans se mettent, en pleine campagne, à danser et à chanter, pour rien, pour personne, pour la joie de vivre. L’art n’est pas autre chose, à l’origine, que ce chant et cette danse. Mais revenons à M. Wells, qui se hâte d’ajouter : « L’œil embrasse plus de beauté en contemplant un oiseau qui plane, un poisson qui s’ébat dans l’eau, les reflets dans une chute d’eau ou toutes les ombres qui se dessinent sous les branches d’un arbre éclairé par le soleil que nous, misérables gâcheurs, puissions espérer imaginer ou imiter ».

 

Certes. Mais selon le mot de Debussy : « Les gens n’admettent jamais que la plupart d’entre eux n’entendent ni ne voient » et c’est le rôle de l’artiste de leur ouvrir les oreilles et les yeux à la beauté du monde. Il est trop facile, presque élémentaire, d’énumérer ici ce que chaque artiste nous enseigne au premier coup d’œil : Rubens, la joie triomphante de vivre ; Renoir, la beauté rayonnante de la créature humaine ; Vermeer de Delft, le charme profond des intérieurs où se jouent les lumières et les ombres ; Chardin, la secrète poésie qui vit au cœur des plus humbles objets, des plus usuels. Tout cela et bien davantage encore…

 

Je sais, hélas ! qu’il n’en est plus ainsi : que ces échanges permanents entre la vie et l’art ne nous sont plus sensibles ; que l’art, né spontanément de la vie, a cessé de nous y ramener avec des facultés plus vives et plus aigües. Les esthètes restent confinés dans un étouffant esthétisme qui n’a d’autre fin que lui-même. Les « viveurs », si je puis les appeler ainsi, ceux qui « vivent leur vie » comme ils disent, m’apparaissent aussi peu soucieux de la beauté des oiseaux qui planent que de la grâce des poissons qui s’ébattent, n’en déplaise à M. Wells. Qu’est-ce que cela veut dire sinon que l’homme a cessé de mettre en jeu toutes ses facultés, de vivre pleinement ? C’est là une des raisons les plus profondes de notre décadence. 

 

Céline, contempteur du monde moderne, pas plus que Wells qui s’en fait l’apologiste, n’y ont trouvé de remède. C’est que l’un et l’autre appartiennent à différents égards, à cette décadence que le Docteur Carrel a si bien diagnostiquée : « Nous cherchons à développer en nous l’intelligence. Quant aux activités non intellectuelles de l’esprit, telles que le sens moral, le sens du beau et surtout le sens du sacré, elles sont négligées de façon presque complète. L’atrophie de ces qualités fondamentales fait de l’homme moderne un être spirituellement aveugle ».

 

Et, pour revenir au sujet de cet article, cela explique bien des erreurs de jugement, bien des réticences, bien des silence…

 

Paul Modave.

Hommage à Maurice Bardèche

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1998

bardeche.jpgHommage à Maurice Bardèche

 

Maurice Bardèche est décédé à 91 ans. Il était l’un des derniers survivants de cette génération de Français qu’on peut qualifier, sans hésitation, de formidables. Mais qui connaît encore son nom aujourd’hui. Qui connaît encore son œuvre?

 

A une époque tranquille, ce professeur, cet historien de la littérature au regard acéré, cet anatomiste subtil et cet homme de synthèses percutantes avait jeté son regard personnel sur chacun des sujets qu’il abordait; sans nul doute et sans difficulté, il a gravi tous les échelons et est devenu un intellectuel de premier rang dans son pays, la France. On peut dire que l’Académie Française se serait levée pour lui, pour l’accueillir en son sein et que des décorations comme la Légion d’Honneur lui auraient été attribuées... Si...

 

Car l’œuvre de Bardèche témoigne de son excellence: les livres de référence qu’il a écrits, sur Proust, Bloy, Balzac, Flaubert et Céline, sont encore reconnus aujourd’hui comme tels. De même, son Histoire du Cinéma, rédigée en collaboration avec Robert Brasillach, est reconnue au niveau international. Ce livre a été édité et réédité, y compris dans une série de poche. On n’oubliera pas non plus son Histoire des femmes. Et, à une époque plus troublée, il a aussi écrit, toujours avec Brasillach, un classique, son Histoire de la Guerre d’Espagne, chronique de la guerre civile espagnole qui a immédiatement précédé la seconde guerre mondiale.

 

Ce fut une époque cruciale dans sa longue vie, un moment d’histoire agité. Les horreurs de la seconde guerre mondiale (que Bardèche n’a jamais niées ou ignorées, contrairement à ce que d’aucuns osent affirmer) ont été suivies par les horreurs de l’après-guerre. Maurice Bardèche, apolitique, a été privé du droit d’exercer sa profession, il a été arrêté, simplement parce qu’il était le beau-frère de Robert Brasillach, son meilleur ami. L’exécution de Brasillach  —un assassinat judiciaire—  a profondément blessé Bardèche, une blessure si intense qu’elle l’a marquée pour le reste de ses jours.

 

Bardèche devient éditeur. Il fonde les éditions «Les Sept Couleurs». Pendant de longues années, il publie le mensuel Défense de l’Occident. Et il écrit des livres politiques (ce qui lui vaudra des poursuites).

 

Quarante ou cinquante ans ont passé depuis la rédaction de ces ouvrages. Qu’en reste-t-il? Indubitablement, certains passages ont été dépassés par les événements, que personne ne pouvait prévoir. Mais on ne pourra pas mettre en doute son souci de maintenir une Europe européenne, de conserver l’identité de ses peuples, de ne pas livrer ceux-ci aux affres d’une américanisation calamiteuse. Surtout, une chose demeure, et c’est son option personnelle: «Etre le dernier tirailleur défendant la liberté et la douceur de vivre».

 

C’est un polémiste virulent qui écrit Nuremberg ou la Terre promise  dans l’immédiat après-guerre (son avocat et ami Jacques Isorni a tenté en vain de le dissuader de publier ce brûlot mais Bardèche était trop profondément touché par la mort de Brasillach pour entendre ce bon conseil). Quelques années plus tard sort Suzanne et le taudis, préfiguration, non, illustration, de cette chère “douceur de vivre”, même dans les circonstances les plus difficiles et les plus dures de la vie. Ce livre est un chef-d’œuvre dans le sens où il est un hommage à la douceur, à l’humour, au sourire qui dit aussi: on ne tuera pas cette belle petite plante.

 

Mais Bardèche est conscient qu’elle est en danger de mort, cette petite plante. Et quand au printemps de 1998, on m’offre un liber amicorum, cette conscience est très nette, car Bardèche écrit à mon intention: «Le drame de notre temps est celui de la dépossession. Nous ne sommes plus maîtres de nos vies, mais pas davantage de nos pensées, de nos goûts, de notre sensibilité —enfin de notre âme. Par la désinformation, la publicité, le mensonge, par la démission des éducateurs et la démission des consciences».

 

En dépit de toutes les différences qui peuvent séparer un Flamand d’un Français, un Européen d’un autre Européen, un homme de droite d’un autre homme de droite, son témoignage m’a donné une fierté modeste, une fierté humble: «Avons-nous été, cher Karel Dillen, les derniers défenseurs de l’arbre de vie contre son triste dépérissement? En défendant votre terre flamande et les hommes de votre race, c’est toutes les autres plantes humaines de toutes les autres races que vous défendez aussi... De même quiconque défend son peuple défend tous les autres peuples, tous les autres hommes. Car la liberté et la vie qu’il demande pour les siens, il les demande en même temps pour les autres par les idées qu’il répand. Par là, votre combat n’est pas seulement pour la Flandre, il est pour tous les peuples de l’Europe, et même au-delà des frontières de l’Europe pour tous les peuples qui ne veulent pas de la prison idéologique».

 

Ensuite vient une phrase qui équivaut à un ordre, puisque Bardèche n’est plus parmi nous: «Et cette aspiration à la vie, elle ne disparaîtra pas avec nous, mais elle nous survivra et même elle sera ressentie un jour comme un combat vital et vos enfants, nos enfants, la reprendront».

 

Vaarwel, Bardèche, Bonne route!

Que lit-on encore de ton œuvre, qu’en lira-t-on demain? Je ne sais pas.

 

Mais ce que je sais, c’est que demeure l’exemple, durable, ineffaçable, indéracinable, comme nous le révèle cette parole de Nietzsche:

«Was er lehrte, ist abgetan;

Was er lebte, wird bleiben stehn:

Seht ihn nur an —

Niemanden war er untertan!».

(Ce qu’il a enseigné a subi l’usure du temps;

Ce qu’il a vécu demeurera debout:

Regardez-le —

De personne jamais il n’a été le valet!).

 

Voilà, Bardèche, ce qu’il reste de l’exemple que nous a donné. Pendant toute ta vie!

 

Karel DILLEN.

(Hommage paru dans Vlaams Blok Magazine, n°9/98).

samedi, 14 novembre 2009

Cioran: un hurlement lucide

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1993

41667.jpgCioran: un hurlement lucide

 

par Luis FRAGA

 

S'il s'avère difficile d'écrire un article pour défendre Cioran (Cioran a-t-il besoin d'être défendu?), les problèmes s'accroissent encore si l'on tente le contraire, si l'on veut l'attaquer, soumettre sa pensée aux feux de la critique: il faut s'armer de courage pour s'en prendre à celui qui, sans nul doute, est à la mode depuis plus de dix ans. Lui présenter des «objections», c'est aller à contre-courant. Mais les reproches qu'on lui a adressés, reproches qui ont servi à mythifier à outrance cet «hétérodoxe de l'hétérodoxie» n'allaient-ils pas, eux, à contre-courant.

 

Un brillant anti-système

 

Toute personne qui éprouve de la difficulté à se prononcer en toute sincérité contre Cioran n'a qu'une solution: tenter d'imiter ces hérétiques qui, soumis à la torture, ne persistaient dans leur hérésie que par bon goût. Et se répandre en louanges à l'endroit de Cioran pourrait sembler d'un mauvais goût comparable à celui qui tenterait d'ordonner en un système cohérent les écrits et les interjections mentales de celui qui a affirmé que «la pire forme de despotisme est le système, en philosophie et en tout».

 

L'avantage de l'anti-système est sa maigre vulnérabilité à toute attaque consistant en objections organisées systématiquement. On ne pourrait réfuter Cioran que de manière a-systématique et toujours dans l'hypothèse douteuse que cette réfutation dépasse le discours du Roumain sur le point précis grâce auquel il arrive justement à séduire: «l'éclat».

 

On peut être brillant  au départ de la «lucidité» et également au départ de la «foi», et même des deux à la fois (à la condition que cette cohabitation soit possible), du moment que l'on soit suffisamment subjectif. L'objectivité est rarement brillante et ne parvient jamais à être géniale. Installé dans la lucidité, Cioran a le privilège de devoir être subjectif par la force.

 

La lucidité et la subjectivité déployées par Cioran lui donnent la force suffisante pour faire face à ce qui se trouve devant lui, sans aucune aide ou échappatoire possible. Avec une sincérité qui épouvante, Cioran paraît même jouir de cette manière tourmentée par laquelle il s'inflige l'atroce nécessité de remâcher sans cesse ses interrogations —et même ses obsessions—  essentielles: l'histoire, Dieu, la barbarie, le suicide, le scepticisme et autres labyrinthes. Ceux-ci sont brillamment exposés comme les dépouilles tirées d'un immense dépeçage où l'on aurait séparé les ordures philosophiques pour laisser, dénudé, ce que personne n'aurait imaginé être essentiel.

 

Volonté de style

 

«Mystère. Parole que nous utilisons pour tromper les autres, pour leur faire croire que nous sommes plus profonds qu'eux» (Syllogismes de l'amertume, 1952).

 

Les grands négociateurs professionnels se distinguent avant tout par leur immense clarté dans la façon d'exposer leurs hypothèses, à l'écart de la complexité de ce qu'ils pensent ou de ce qu'ils prétendent. Idem avec le style concis et simple de Cioran. Il ne perd pas son temps dans les arcanes du langage et dans un discours prétendument «profond», et il va droit au but avec une précision de scalpel, dont on ne peut que faire l'éloge.

 

Ayant perdu la foi dans la grammaire («Nous continuons à croire en Dieu parce que nous croyons encore en la Grammaire»), le Roumain connait bien les limites du langage auquel il doit forcément recourir. Aussi le domine-t-il. Le français n'est pas sa langue maternelle et cependant peu d'écrivains vivants le manient avec tant d'efficacité. La proposition de Wittgenstein  —«tout ce que l'on peut exprimer, il est possible de l'exprimer clairement»—  voilà ce qu'auraient dû méditer avec une plus grande attention ceux qui prétendent snober le style «superficiel» de Cioran.

 

Indépendance

 

Avec une sincérité totale, Cioran accepte le défi d'être inclassable. Un poids plus lourd qu'on pourrait l'imaginer: il n'est pas facile d'être apatride et, à la longue, rares sont ceux qui survivent «sans profession ou métier connu».

 

«Lunatique», «hétérodoxe»: voilà, entre autres, les qualificatifs qui ont été appliqués à Cioran. Par ceux qui sont parvenus, tant bien que mal, à le «classifier». Ce sont également les étiquettes qu'acceptent bon gré mal gré ces rares personnages de la vie réelle qui, tirant orgueil de leur extrême lucidité, doivent maintenir coûte que coûte leur acharnement, rester digne d'éloges précisément parce qu'ils sont acharnés plus que de raison, demeurer indépendants, ne pas s'imposer ou ne pas accepter de se voir imposer une limite quelle qu'elle soit. Pendant la Renaissance, on appelait «humaniste» l'homme non unidirectionnel. Cioran rejeterait sans aucun doute cette désignation avec véhémence; de la même façon, il se moquerait très probablement de tout qui tenterait de le classer comme «réactionnaire», ou comme «sceptique»,  comme «païen» ou lui attribuerait d'autres étiquettes simplificatrices du même genre.

 

L'indépendance, comprise comme élimination progressive de tous points de référence, est un exercice douloureux, dont les douleurs ne disparaissent jamais. Difficile, par ailleurs, d'évaluer jusqu'à quel point le résultat obtenu compense le prix payé. De tous les génies du XIXième siècle, seul Wagner et Goethe se sont «bien débrouillés». Nietzsche, Hölderlin, Rilke et d'autres, nombreux, ont produit des écrits que l'on peut qualifier d'enviables. Et bien qu'ils puissent tous affirmer, avec Cioran, que «naître, vivre et mourir trompés, c'est ce que font les hommes», aucun d'entre eux, à l'évidence, n'a atteint l'indépendance à laquelle ils prétendaient parvenir; peut-être s'en sont-ils approchés, certains plus que d'autres, mais il ne s'y sont jamais installés, n'ont pas eu les pleins pouvoirs de l'homme réellement indépendant.

 

Par rapport au XIXième siècle, le XXième siècle offre peut-être l'avantage d'être réellement plus indépendant (bien que cela soit également difficile). Mais les hommes moyens continuent encore à exiger de tout un chacun des «étiquettes», des «professions» ou des «métiers». Ces hommes moyens font montre d'une attitude proche de celle de ces Etats qui aspirent à tout contrôler dans la société. Ils ne se sentent à l'aise face à une personne ou à un phénomène que s'ils peuvent le classer, lui donner un titre ou une étiquette, le conceptualiser. Titre, étiquette ou concept qui déterminera, par déduction, le type de relation qu'il faut avoir, au nom des conventions, avec l'étiquetté, le titré, le conceptualisé. «Les hommes ont besoin de points d'appui, ils veulent la certitude, quoi qu'il en coûte, même aux dépens de la vérité».

 

Le médiocre de notre temps tente d'ôter de sa vue, de ses pensées, tout ce qu'il ne comprend pas. Tout ce qu'il est incapable de comprendre. «Je suis comptable», «je suis avocat», «je suis vendeur» (parfois, plus souvent que nous ne l'imaginons, on recourt à l'euphémisme pour rendre digne un métier dont on perçoit bien les misères). Voilà donc les déclarations officielles à faire obligatoirement de nos jours en société.

 

Que des hérétiques comme Cioran ne confient pas au Saint Office Collectif leur titre de dépendance ou leurs numéros d'identification sociale, voilà qui les soumettra irrémédiablement à la réprobation générale et même à l'isolement. Ils ne réveilleront que la curiosité du petit nombre, ou la sympathie de personnalités plus rares encore, mais ils devront constater et accepter d'être toujours observés (et même jugés) avec la même colère critique que l'on appliquait jadis aux pires des hérétiques. L'indépendance coûte cher.

 

Cioran, l'Anti-Faust

 

On a parlé de Cioran comme du porte-drapeau de la philosophie du renoncement, de la «non-action» et du désistement. Ceux qui décrivent Cioran de la sorte prétendent rapprocher notre exilé roumain de son maître Bouddha et n'oublient généralement pas de mentionner son célèbre adage: «Plus on est, moins on veut». Ou de nous rappeler, en guise de plaisanterie, sa description fort crue de l'acte d'amour: il s'agirait «d'un échange entre deux êtres de ce qui n'est rien d'autre qu'une variété de morve». Le rapport qui existe entre Cioran et l'idée d'action (ou si l'on préfère, le désir) est un rapport de conflit.

 

Personne ne niera que le principe faustien de la souveraineté de l'action soit radicalement opposé au scepticisme féroce de celui qui élève l'inaction au rang de catégorie divine. Et même si l'action et le goût pour l'action sont compatibles avec la lecture de Cioran, nous nous trouvons néanmoins en présence de deux extrêmes irréconciliables. Un livre de Cioran est inimaginable sur la table d'un broker  de New York. Et personne n'aura l'idée saugrenue d'emmener des livres de Cioran lors d'une régate de voiliers, d'une expédition dans l'Himalaya ou d'une escapade avec une belle femme dont on vient de faire la connaissance. Cependant, les fanatiques de l'action les plus intransigeants pourront se lancer dans une activité exceptionnelle, où ne détonneraient absolument pas certaines pages de Cioran: traverser un désert.

 

Trois critiques de Gus Bofa sur Céline

celine-et-arletty.jpgTrois critiques de Gus Bofa sur Céline

Article paru dans "Le Bulletin célinien", n°297, mai 2008

Gustave Blanchot, dit Gus Bofa (1883-1968), fut un illustrateur et un affichiste français de grand talent, bien oublié aujourd’hui. Grâce à la brève mais florissante vogue du livre de luxe dans la France des années 20, il parvint à réaliser la synthèse entre le dessin et l’écriture, laissant une œuvre singulière qu’il faudrait redécouvrir. Entre les deux guerres, il collabora, comme critique littéraire, au mensuel Le Crapouillot de Jean Galtier-Boissière. Son ami Pierre Mac Orlan a dit de lui : « Gus Bofa est avant tout un écrivain qui a choisi le dessin pour atteindre ses buts. Un texte de Bofa, un dessin de Bofa sont construits dans la même matière et l'un et l'autre sont animés de ce même rayon de poésie humoristique qui comprend tout ce qui tient une place entre la vie et la mort. ». Nous reproduisons ici les trois notes de lecture qu’il consacra à Céline en 1933 et 1937.

 

Voyage au bout de la nuit[

 

L'autre roman-dreadnought. Autant le livre de M. Mazeline est habilement construit et armé de tous les perfectionnements les plus récents, autant celui-ci est désobligeant, non-conforme aux règles, en quelque sorte difforme. Et pourtant il flotte. Et il y a là-dedans le meilleur et le pire : des pages d'humour excellentes, un très grand souffle de vérité profonde, émouvante, sous ce vagabondage délirant qui n'en finit plus, et surtout une rogne persistante, obstinée, souvent puissante, qui réjouira ou navrera le lecteur, dès l'abord, selon son goût et son tempérament. Ce mélange un peu chaotique, ce choix délibéré d'être sincère avec soi, au prix même d'être déplaisant, peuvent bien signifier le génie, dans le cas de M. Céline. Il est bien vrai qu'il y a, dans ce trop gros bouquin, quelque chose de considérable, d'anormal, d'inquiétant, mais de neuf, qui rebute d'abord et séduit ensuite, d'un attrait bien étonnant. Par une sorte de perversité inexplicable, l'auteur a adopté, pour rendre plus difficile la lecture de cette confession, une sorte de langue nouvelle, mêlée de péquenot et d'argot, que rien dans le personnage de son héros ne peut justifier et que lui-même oublie parfois pour parler en français. L'effet en est curieux, mais sans charme.

(Le Crapouillot, 1er février 1933)

 

L'Église

 

Cette pièce énigmatique n'a pas été jouée encore, et, malgré le succès du Voyage au bout de la nuit, ne le sera probablement jamais.

C'est dommage d'ailleurs, car elle ne prendrait son véritable sens qu'à la scène.

L'audace de certaines scènes y trouverait sa valeur de scandale possible, qui passe iaperçue à la lecture.

Le livre de Céline nous a étonné surtout par sa masse, aggravée d'un argot fanriqué exprès, plus encore que par la qualité ou la violence des idées de l'auteur.

La pièce, plus schématique, moins travaillée et surchargée, ne nous fournit plus cette sorte d'inquiétude qui donnait au roman sa qualité.

Céline n'est pas un pamphlétaire né. toute son énergie satirique est artificielle. c'est un effort brutal et vite vulgaire, pour sortir de soi-même, qui est timide, passif, bon et pitoyable.

Cet effort apparaît constamment à la lecture de ces cinq actes. il serait insensible au théâtre.

L'acte de la S.D.N., qui est un excellent sketch de revue, y serait amusant. Et certaines scènes – si la censure les laissait passer – y prendraient un caractère d'obscénité, capable d'émouvoir sûrement le public difficile de bourgeois moyens, que l'auteur veut atteindre d'abord.

Les fidèles de cette fameuse Eglise, qu'il renie si énergiquement.

 

(Le Crapouillot, 15 novembre 1933)

 

NDLR : Cette pièce fut jouée pour la première fois, par une troupe d’amateurs, le 4 décembre 1936, au Théâtre des Célestins, à Lyon.

 

Mea culpa suivi de La vie et l'œuvre de Semmelweis

 

La déconvenue parallèle de Céline s'exprime plus vertement que celle de Gide.

Elle est aussi plus totale et définitive.

Ecoeuré de l'Etat bourgeois, Céline a voulu croire au communisme russe. Déçu à nouveau, sa haine et son dégoût du monde occidental se doublent désormais d'une haine et d'un dégoût semblables pour l’U.R.S.S.

il exprime ce double sentiment – à son ordinaire – par un feu d'artifice d'imprécations choisie, pleines de force et de couleur, qui, étant cette fois admirablement en situation, prennent toute leur valeur littéraire. le morceau me paraît atteindre au chef-d'oeuvre du genre et mérite de figurer dans les anthologies.

Au point de vue critique, on pourrait trouver à y reprendre. Il détaille et précise mal ses griefs et ses reproches. Mais il n'est pas dans la nature de Céline de spéculer, non plus que dans celle d'une mitrailleuse de faire des cartons à la foire.

Parmi les éclats de tonnerre de son style, on discerne à peu près la solution que Céline propose au problème social.

Il voudrait abattre sommairement la moitié des humains, et massacrer sans façon l'autre moitié.

Ce remède, radical au moins en ce qui concerne le chômage, me semble mériter d'être longuement pesé.

Dans la seconde partie de Mea culpa (sans prendre sa part du titre, j'imagine!) il publie une réédition de sa thèse de doctorat sur la vie douloureuse et méconnue de Semmelweiss, "l'inventeur" de l'antisepsie.

Cet essai, écrit (pour un tas de raisons excellentes) dans une langue plus sévère et réservée que le Voyage ou Mort à crédit, n'en laisse pas moins apparaître l'ardeur, l'exubérance de son tempérament littéraire, comprimé comme la vapeur d'essence dans un moteur d'avion où chaque étincelle provoque une explosion et actionne les pistons dans les cylindres.

A l'état de prime jeunesse qu'il nous montre dans cette thèse d'examen, il rappelle par plusieurs points le tempérament d'un autre écrivain qui eut son heure de célébrité : Joseph Delteil.

Il y eut même un précurseur à l'un et à l'autre, oublié aujourd'hui, qui ne pouvait lui aussi écrire qu'à coups de canon et de hache, et qui avait nom : Georges d'Esparbès.

Mais c'étaient de pauvres petits canons de l'époque, qui paraissent risibles à côté de l'artillerie de dreadnought de Céline !

(Le Crapouillot, 15 février 1937)

 

 

samedi, 07 novembre 2009

L.-F. Céline et Jacques Doriot

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L.-F. Céline et Jacques Doriot

Textes parus dans "Le Bulletin célinien", n°297, mai 2008

 

Durant l’Occupation, deux grands partis étaient en concurrence : le PPF de Jacques Doriot et le RNP de Marcel Déat.  Les collaborationnistes, eux, se partageaient tout naturellement en deux camps : ainsi, au sein de la rédaction de l’hebdomadaire Je suis partout, Lucien Rebatet était un partisan de Déat alors que Pierre-Antoine Cousteau, lui, soutenait Doriot. La parution d’une monographie consacrée au chef du PPF nous donne l’occasion de revenir sur les relations entre lui et Céline.

 

   Une chose est certaine : même s’il lui reconnaissait du talent, Céline estimait Marcel Déat suspect en raison de ses anciennes fréquentations maçonniques et de ses liens étroits avec le parlementarisme de la IIIe République.

Ainsi, dans sa correspondance à Lucien Combelle, Céline n’a que sarcasmes  pour le chef du Rassemblement National Populaire ¹. Avant-guerre, Céline ne réservait d’ailleurs pas un sort plus enviable à Doriot, le raillant comme tous ceux (La Rocque, Maurras,…) qu’il qualifiait ironiquement de « redresseurs nationaux » ou de « simples divertisseurs » : « Alors avec quoi il va l’abattre Hitler, Doriot ? (…) Il veut écraser Staline en même temps ? Brave petit gars ! Pourquoi pas ? D’une pierre deux coups !... (…) Nous sommes en pleine loufoquerie » ². Céline, chantre d’une alliance continentale censée prévenir une guerre fratricide, voyait naturellement d’un mauvais œil les menées qu’il estimait bellicistes.

 

   Mais, sous l’Occupation, son appréciation de Doriot évolue,  celui-ci ayant adopté le tournant radical que l’on sait après la rupture du pacte germano-soviétique. Le chef du PPF lui-même s’engage en septembre 1941 dans la Légion des Volontaires Français contre le bolchevisme qui vient de se créer. Dans un entretien que Céline accorde peu de temps après à l’hebdomadaire doriotiste L’Émancipation nationale, il déclare : « Doriot s’est comporté comme il a toujours fait. C’est un homme. Eh oui, il n’y a rien à dire. Il faut travailler, militer avec Doriot. (…) Chacun de notre côté, il faut accomplir ce que nous pourrons. Cette légion si calomniée, si critiquée, c’est la preuve de la vie. J’aurais aimé partir avec Doriot là-bas, mais je suis plutôt un  homme de mer, un Breton. Ça m’aurait plu d’aller sur un bateau, m’expliquer avec les Russes. » ³. Pour les besoins de sa défense, Céline démentira après-guerre avoir tenu ces propos. Mais, dans une lettre adressée au même moment à Karen Marie Jensen, il écrivait : « J’irai peut-être tout de même en Russie pour finir. Si les choses deviennent trop graves, il faudra bien que tout le monde participe – ce sera question de vie ou de mort – si cela est vivre ce que nous vivons ! 4 »

 

   Quelques mois plus tard, le dimanche 1er février 1942, a lieu au Vélodrome d’Hiver un meeting organisé par la LFV sous la présidence de Déat avec Doriot comme invité vedette.  Céline y assiste en compagnie de Lucette Destouches. Une photographie en atteste, légendée de la sorte dans L’Émancipation nationale : « Le grand écrivain Louis-Ferdinand Céline a assisté à la réunion du Vél’d’Hiv’. Le voici suivant avec attention l’exposé de Jacques Doriot,  “Ce  que j’ai vu  en  U.R.S.S.“ » 5 .

   Alors que Doriot a regagné le front de l’Est, Céline lui adresse une lettre qui sera publiée dans le mensuel de doctrine et de documentation du PPF, les Cahiers de l’émancipation nationale. Céline y préconise notamment l’instauration d’un parti unique, « L’Aryen Socialiste Français, avec Commissaires du Peuple, très délicats sur la doctrine, idoines et armés » 6. Un passage vilipendant l’Église ayant été caviardé, il critiquera vivement « Doriot, formel et devant témoins, [qui avait juré]  de  tout  imprimer » 7. On observera que, durant toute l’Occupation, aucune lettre de Céline n’est publié dans L’Œuvre, le quotidien de Marcel Déat.

 

   Après une permission, Doriot rejoint à nouveau le Front de l’Est en mars 1943. Occasion pour son journal Le Cri du peuple de solliciter, durant une quinzaine de jours, les réactions de personnalités, dont Céline qui, laconique,  aurait déclaré : « Je n’ai pas changé d’opinion depuis août  [en fait, septembre] 1941, lorsque Doriot est parti pour la première fois » 8.

 

   Comme on le sait, toutes les lettres que Céline adressa aux journaux de l’occupation n’ont pas été publiées. Un exemple fameux : la lettre sur la France du nord et du sud adressée de Bretagne à Je suis partout (juin 1942). Jugée impubliable par la rédaction, elle fut conservée par le secrétaire de rédaction, Henri Poulain, pour n’être exhumée qu’un demi-siècle plus tard 9.

Apparemment, une autre lettre – adressée en août 1943 à Jacques Doriot – aurait subi le même sort car elle mettait en cause des cadres du PPF. Elle n’était d’ailleurs peut-être pas destinée à la publication, celle-là, encore que Céline l’aurait remise personnellement à Doriot. Voici ce qu’en écrit Victor Barthélemy, secrétaire général du parti et familier des réunions dominicales à Montmartre  : « Un dimanche de septembre [1943], je profitai de l’occasion pour dire deux mots à Céline à propos d’une lettre qu’il avait adressée, ou plutôt portée lui-même à Doriot, après l’affaire Fossati [NDLR : cadre du PPF exclu pour avoir entamé, sans l’aval de Doriot, des négociations avec le RNP en vue de la création d’un parti unique]. Céline affirmait qu’il n’était pas étonnant que Fossati « fût un traître », car avec ce nom en i et son origine « maltaise » c’était couru d’avance… D’ailleurs  il était  urgent que Doriot se débarrasse de ces Méditerranéens douteux (toujours les noms en i ou en o) tels que Sabiani, Canobbio, etc., et aussi de ce Barthélemy, dont le patronyme commençant par « Bar » pouvait à bon droit laisser supposer des origines juives. (À l’époque, on prétendait volontiers que les préfixes Ben, Bar, Ber pouvaient constituer présomption d’origines juives.) Cette lettre, Doriot me l’avait fait lire, en riant à gorge déployée : “Ce Ferdinand, il est impayable !”, avait lancé Doriot. J’en étais, pour ma part, un peu irrité, et bien décidé à dire à Ferdinand ce que j’en pensais. Il prit lui aussi la chose en riant et l’affaire fut « noyée » comme il convenait » 10. Maurice-Ivan Sicard, autre cadre du PPF, écrira, de son côté, que « les lettres que [leur] envoyait Céline étaient délirantes, difficilement publiables » 11.

 

   Plus tard, lorsque les jeux seront faits, Céline daubera sur le jusqu’au-boutisme des ultras et fera, dans D’un  château l’autre, un portrait sans complaisance des rescapés de la collaboration échoués dans le Bade-Wurtemberg. Quand on lui reprochera d’avoir fréquenté Doriot  à  plusieurs reprises, il écrira : « Il n’était point bête et mon métier de médecin et de romancier est de connaître tout  le monde » 12.  Manière de dire que seule sa curiosité était coupable…

Marc LAUDELOUT

Notes

1. « 43 lettres à Lucien Combelle (1938-1959) » in L’Année Céline 1995, Du Lérot-Imec Éditions, 1996, pp. 68-156. Relevons que ce sentiment n’était pas réciproque :

 « Céline, cette source vivante du verbe, qui,  après des livres prophétiques et macabres, rabelaisiens et pessimistes, avait publié Les Beaux draps, ceux-là mêmes que les bien-pensants vichyssois n’auraient pas voulu qu’on lave à la fontaine, et que, justement, il fallait blanchir avant de refaire le lit de la France » (Marcel Déat, Mémoires politiques, Denoël, 1989, p. 774).  Voir aussi cette relation d’un dîner chez le docteur Auguste Bécart, ami doriotiste de Céline : «  On arrive ainsi à 8 h moins le quart. Lecourt et le Dr Bécart viennent nous prendre. Nous dînons chez celui-ci avec Céline, etc. Très intéressant. Pluie de vérités truculentes sur tout le monde. Attaques raciales contre Laval “nègre et juif”, etc. Au demeurant très sympathique. » (« Journal de guerre de Marcel Déat », note du 23 décembre 1942, Archives nationales. Extrait cité par Philippe Alméras in Les idées de Céline, Berg International, coll. « Pensée Politique et Sciences Sociales », 1992, p. 172.)

2. L’École des cadavres, Denoël, 1938, p. 257. Doriot est également évoqué pages 84 et 174. Voir aussi Bagatelles pour un massacre, Denoël, 1937, p. 310.

3. Lettre inédite à Karen Marie Jensen, 8 décembre [1941], citée par François Gibault in Céline. Délires et persécutions (1932-1944), Mercure de France, 1985, p. 288.

4. Ivan-M. Sicard, « Entretien avec Céline. Ce que l’auteur du Voyage au bout de la nuit “pense de tout ça...” », L’Émancipation nationale, 21 novembre 1943. Repris dans Cahiers Céline 7 (« Céline et l’actualité, 1933-1961 »), Gallimard, 1986, pp. 128-136.

5. Albert Laurence, « Le Meeting », L’Émancipation nationale, 7 février 1942.

6. « Lettre à Jacques Doriot », Cahiers de l’Émancipation nationale, mars 1942, repris dans Cahiers Céline 7, op. cit., pp. 155-161.

7. Lettre à Lucien Combelle, 17 mars [1942] in L’Année Céline 1995, op. cit., p. 117.

8. « Le Départ de Doriot, Céline a dit... », Le Cri du peuple de Paris, 31 mars 1943,  repris dans Cahiers Céline 7, op. cit., p. 185.

9. Louis-Ferdinand Céline, Lettres des années noires, Berg International, coll. « Faits et Représentations », 1994, pp. 29-35.

10. Victor Barthélemy, Du communisme au fascisme. L’histoire d’un engagement politique, Albin Michel, 1978, pp. 365-366.

11. Saint-Paulien, Histoire de la collaboration, L’Esprit nouveau, 1964, p. 257.

12. Lettre à Thorvald Mikkelsen, 2 juillet 1946 in Louis-Ferdinand Céline, Lettres de prison à Lucette Destouches et à Maître Mikkelsen, Gallimard, 1998, p. 257.

 

 

 

Jacques Doriot

DoriotLaFrance.jpgFormé dans les écoles du Komintern à Moscou, député communiste à 25 ans, maire de Saint-Denis à 32, Jacques Doriot fut au sein du PCF le grand rival de Maurice Thorez. Pour avoir refusé de se plier aux exigences de Staline et prôné trop tôt un rapprochement avec les socialistes, il est exclu du Parti en 1934.

Deux ans plus tard, il fonde le Parti populaire français (PPF), qui n’est pas encore un parti fasciste au sens strict du terme, mais qui le deviendra pendant l’Occupation. Rallié prudemment à la Collaboration tant qu’a subsisté l’hypothèque du pacte germano-soviétique, Doriot ne brûlera vraiment ses vaisseaux qu’en juin 1941, lorsque les divisions allemandes se lanceront à l’assaut de l’URSS. Il réclame alors la création d’une Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) et, de tous les dirigeants des grands partis collaborationnistes, il sera le seul à combattre sur le front de l’Est, à plusieurs reprises.

Alors que les Allemands se méfient de lui, il affiche désormais sa volonté de faire du PPF « un parti fasciste et totalitaire » (novembre 1942) et finit par trouver auprès des SS le soutien que lui a refusé Otto Abetz sur instruction d’Hitler. Il trouvera la mort en Allemagne, le 22 février 1945, mitraillé sans doute au hasard par des avions alliés.

Ainsi disparaissait l’une des figures les plus énigmatiques de l’histoire politique française du XXe siècle. Le livre de Jean-Claude Valla retrace le destin singulier d’un personnage dont Pierre Pucheu, qui ne l’aimait guère, a pu écrire : « À vrai dire, je n’ai pas connu dans notre génération d’homme ayant reçu à tel point du ciel des qualités d’homme d’État. »

 

Jean-Claude Valla, Doriot,  Éd. Pardès, coll. « Qui suis-je ? », 2008, 128 pages, ill. (12 €).

samedi, 31 octobre 2009

Dominique de Roux et L.-F. Céline

derouxceline2.jpgDominique de Roux et L.-F. Céline

Textes parus dans "Le Bulletin célinien", n°286, mai 2007

 

 

Passionnante correspondance que  celle de  Dominique de Roux.  Les lettres du début des  années  soixante  intéresseront  particulièrement les lecteurs de ce Bulletin.  On y voit  un  jeune homme  de vingt-sept ans préparer activement un monument qui éblouira plusieurs générations de céliniens.  Comme l’écrit Jean-Luc Barré, l’éditeur de cette correspondance, « Dominique de Roux prend conscience de l’ostracisme qui pèse, depuis la fin de la guerre,  sur  une  génération de poètes et d’écrivains frappés d’interdit en raison de leurs prises de position politiques, nonobstant le génie de quelques-uns dont Céline. Cette prise de conscience sera à l’origine, en 1961, de la création des Cahiers de l’Herne, précisément conçus pour réhabiliter ou faire mieux connaître l’œuvre des “grands réprouvés” de la création contemporaine, française et étrangère. » 

 

   Quelques mois avant la mort de Céline, en mars 1961, Dominique de Roux songe à lui écrire afin de solliciter son témoignage sur Bernanos auquel sera consacré le deuxième « Cahier de l’Herne » (le premier fut centré sur René-Guy Cadou). Le 10 juillet, il écrit à Robert Vallery-Radot : « Je devais aller le voir pour notre Cahier Bernanos, saisir une interview sur votre ami. C’est à Bernanos mort qu’on a demandé un témoignage sur le Céline enterré. Le Figaro a ressorti un article qui traite du Voyage au bout de la nuit»

Comment ne pas rêver à cette rencontre Céline – de Roux ¹ et regretter que le premier n’ait pas pu prendre connaissance de cette somme à lui consacrée ?

   Pour ce cahier, il rencontre, au début de l’année suivante, Lucien Rebatet qui lui donnera un intéressant témoignage : « L’homme m’a reçu très gentiment, avec une gentillesse dont je ne doutais pas ; mais vous le connaissez, petit, nerveux, robuste, avec des muscles longs, des muscles sur les mains, une tête carrée, des yeux vifs, une voix grave, de la gorge, un peu capitaine de la marine en bois, s’exclamant, riant, s’enquérant tour à tour, violent parfois et avide de se renseigner. (…) Ce que je regrette le plus en cet homme courageux dont le premier abord m’a pris, c’est son esprit antisémite, toujours, et  une certaine méchanceté encore, qui fait des Décombres un livre insupportable malgré des pages magnifiques et un chapitre sur Maurras, Pujot, l’A. F. de la rue du Boccador qui est un portrait d’anthologie. » Et de conclure le portrait par cette formule tranchante comme un couperet : « Rebatet, c’est Robespierre ».

   En août, on le voit travaillant à ce numéro qui sortira de presse au début de l’année suivante : « J’émerge de plusieurs semaines de travail consacrés entièrement à Céline. Je n’ai pas levé les yeux de kilos de documents : revues, coupures de presse, etc.,  les classant, les relevant en une bibliographie précise. J’ai remonté de la nuit à l’aurore. Quel poète énorme, quel lyrisme ! Quelle pitié ! »

   derouxceline3.jpgEn octobre, il rencontre deux autres témoins importants : Marcel Brochard, qui lui fera des confidences (dont certaines absentes de son témoignage), et Évelyne Pollet qui vint le voir à Paris : « Céline disait : une ville pour moi est une femme. Étreintes rapides dans les hôtels du bord de l’Escaut, détails croustillants (il faisait vite et une fois lavé interdisait qu’on lui parle amour). Évelyne, cinquante-cinq ans, belle encore, haute stature flamande, blonde, yeux bleus, de beaux restes, pleure sur son amant. »

   Bien entendu, Dominique de Roux se rendit à plusieurs reprises à Meudon : « Cet après-midi, le jour tombant, je l’ai passé assis sur des nattes dans le bureau de Céline à Meudon, sa femme Lucette si fine, si aérienne, si gracieuse, parlant de Louis, de Saint-Malo… »

Portrait sensible qui ne sera pas payé de retour : Lucette le qualifia de « brillant avorton, visqueux à force d’être brillant », lui reconnaissant tout de même une « belle énergie littéraire » ² — et pour cause.

   Alors que ce premier cahier de l’Herne consacré à Céline est sorti de presse, il songe déjà à « un livre (…) qui ne serait pas une vie de Céline, mais comme Bernanos a écrit sa vie de Drumont. ». En juin 1965, il est aux prises avec cet ouvrage : « Cela m’épuise. L’écriture est comme l’amour fou, une obsession, un penchant morbide et l’effort m’éreinte. »

On regrette évidemment que, dans cette correspondance choisie, il n’y ait aucun écho de la réception critique tumultueuse de son livre La mort de L.-F. Céline et notamment de la polémique avec l’équipe de Tel Quel. Il faut surtout regretter que l’éditeur de cette correspondance n’ait pas pris contact avec Marc Hanrez, autre pionnier célinien, auquel Dominique de Roux adressa une centaine de lettres dont, on s’en doute, beaucoup concernent précisément Céline.

 

Marc LAUDELOUT

 

1. Elle eut lieu néanmoins (voir ci-contre).

2. Marc-Édouard Nabe, Lucette, Gallimard, 1995, pp. 66-67.

 

 

 

Chronologie de Roux / Céline

Janvier 1963.  Parution  du premier numéro des  Cahiers de l’Herne consacré à Céline. Grand succès. Dominique de Roux y annonce la création d’une « Société des Amis de Céline ». Le siège de la société est fixé à Meudon, route des Gardes. Cette association, dont l’un des buts était de réunir de la documentation sur Céline, eut une existence éphémère, d’autant qu’elle fut rapidement désavouée par Lucette Destouches. « J’ai trop fréquenté un moment les “amis” de Céline pour vous dire qu’une telle association était impossible, tant les querelles, mesquineries, jalousies éclatent et fusent sans cesse. Madame Destouches n’avait fait que jeter de l’huile sur ce feu tremblant. Alors à quoi bon ? Mieux vaut continuer de défendre sa mémoire et son œuvre en en parlant, en écrivant sur Céline et nous retrouver comme aujourd’hui amis, grâce à l’auteur du Voyage » (lettre de Dominique de Roux à Edmond Gaudin, 1968).

 

deroux.jpgMars 1962 : Dominique de Roux souhaite la réédition de Bagatelles pour un massacre. Refus en mai de Gallimard. « Je le trouve révulsé. Il me montre une lettre qui vient de lui arriver de la maison Gallimard, en réponse au vœu qu’il exprimait de savoir, avant Cahier, si seraient rééditées Bagatelles pour un massacre. Non, lui dit-on, en aucune façon il ne sera procédé à cette réédition, ni dans l’immédiat ni dans un futur volume de Céline en Pléiade. C’est définitif. Paulhan bien d’accord là-dessus lui aussi. Dominique de Roux râle, frappe la lettre de son coupe-papier, conchie  les lâchetés éditoriales ! »  (Christian Dedet,  Sacrée  jeunesse,  op.  cit., p. 385). Deux ans plus tard, le projet d’une « anthologie » des pamphlets de Céline, par les éditions de L’Herne, ne sera pas davantage couronné de succès.

 

Mars 1965. Second numéro spécial des Cahiers de l’Herne consacrés à Céline.

 

Hiver 1966 : Parution de La mort de L.-F. Céline aux éditions Christian Bourgois. Violente polémique  entre  Dominique de Roux et  la revue Tel quel,  dirigée par Philippe Sollers, suivie d’un non moins violent réquisitoire de Jean-Pierre Faye dans Le Nouvel Observateur. Le livre obtient le « Prix Combat » au début de l’année suivante.

 

Mars 1968 : Première réédition (partielle) des « Cahiers de l’Herne » sur Céline en format de poche (Éd. Pierre Belfond). La seconde paraîtra en 1987 (Le Livre de poche).

 

Avril 1969 : Participation de Dominique de Roux à l’émission « Bibliothèque de poche » de Michel Polac consacrée à Céline. Déprogrammée, cette émission sera finalement diffusée en deux parties, les 2 et 18 mai, sur la 2ème chaîne de la télévision française.

 

1972 : Réédition en un volume, sans l’iconographie mais avec la bibliographie mise à jour, des deux Cahiers de l’Herne.

 

Mars 1997 : La revue Exil (H) publie un numéro spécial « Dominique de Roux / Louis-Ferdinand Céline » sous la direction de Pascal Sigoda.